PRATIQUES PROMETTEUSES
Un balado sur la santé mentale et les dépendances

Épisode 4 : Ontario

Épisode 4 : Service de télésanté mentale pour les enfants et les jeunes (ON)

14 avril 2021 – Cette initiative a recours à la vidéoconférence pour donner accès à des consultations et à des soins spécialisés en santé mentale aux enfants et aux jeunes des régions rurales, éloignées ou mal desservies. Ce service permet aux enfants et aux jeunes de l’Ontario d’entrer en contact avec des spécialistes qui peuvent les aider.

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Loretta O’Connor : Bienvenue à nouveau dans la série Pratiques prometteuses, une série de balados sur la santé mentale et les dépendances présentée par les premiers ministres des provinces et territoires. Je vous présente maintenant le quatrième épisode de la série, où nous partageons les pratiques prometteuses qui ont cours dans chaque province et chaque territoire. Ici Loretta O’Connor. Je suis directrice générale du Secrétariat du Conseil de la fédération.

Aujourd’hui, nous sommes en Ontario. Situé au centre du Canada, l’Ontario est la province la plus populeuse au pays avec plus de 14,7 millions de personnes. Les résidents de l’Ontario peuvent vivre différemment l’accès à des services d’aide et de soutien en santé mentale et dépendances. Les disparités socioéconomiques ou régionales, par exemple, ont une influence sur la façon dont les services sont offerts.

Aujourd’hui, nous aurons l’occasion d’en savoir plus sur une expérience tout à fait unique en Ontario : il s’agit du Service de télésanté mentale. Ce service a d’abord été créé pour répondre aux besoins de la clientèle du nord de l’Ontario, qui est une région plus rurale et moins peuplée de la province. Par la suite, le Service de télésanté mentale a été amélioré et élargi pour être offert à la grandeur de la province afin de prendre en charge les problèmes d’accès limité à une expertise spécialisée en santé mentale, principalement en psychiatrie pédiatrique et pour les adolescents. Tout d’abord, nous allons entendre le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, ainsi que le ministre associé délégué à la Santé mentale et à la Lutte contre les dépendances, Michael Tibollo.

Ceci est une traduction du message livré par le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford. Ses propos ont été enregistrés en anglais.

Premier ministre Doug Ford : Bonjour à tous. Il me fait grandement plaisir de collaborer avec les autres premiers ministres des provinces et des territoires à la série de balados intitulée Pratiques prometteuses, dirigés par mes amis, le premier ministre Silver du Yukon et le premier ministre Moe de la Saskatchewan.

Je sais que la pandémie de COVID-19 a représenté une épreuve pour bien des gens. Maintenant plus que jamais, nous devons nous exprimer et contribuer à éliminer les préjugés qui entourent la santé mentale et la toxicomanie. Tous peuvent être touchés – les membres de notre famille, nos amis, nos collègues et même nous. À titre de premier ministre de l’Ontario, je veux m’assurer qu’il y ait toujours quelqu’un qui soit présent, prêt à tendre l’oreille et à venir en aide à ceux qui en ont besoin.

Nous travaillons fort pour nous assurer que tous les Ontariens ont accès aux mesures d’aide qu’il leur faut pour répondre à leurs besoins particuliers, à l’endroit et au moment où ils en ont besoin. C’est la raison pour laquelle nous avons créé le plan Vers le mieux-être, qui vise à implanter des systèmes entièrement connectés de lutte contre les problèmes de santé mentale et de toxicomanie dans la province.

Aujourd’hui, nous parlerons du Service de télésanté mentale de l’Ontario. Il s’agit là vraiment d’un programme formidable et novateur qui aide à mettre les enfants et les jeunes vivant dans les communautés mal desservies des régions rurales et éloignées en contact avec l’aide et le soutien dont ils ont besoin afin qu’ils puissent recevoir de l’aide, peu importe où ils se trouvent dans notre province.

Je veux que vous sachiez tous que vous n’êtes pas seuls. Ensemble, efforçons-nous de mettre fin aux préjugés entourant la santé mentale. Continuons d’en parler, de poser des questions et de partager des récits et des pratiques prometteuses, comme nous le faisons aujourd’hui.

Je suis accompagné aujourd’hui de Michael Tibollo, ministre associé délégué à la santé mentale et à la lutte contre les dépendances. Michael est un vrai chef de file : il fait un travail formidable alors qu’il dirige nos efforts en ces temps critiques et il travaille directement auprès des gens sur le terrain et dans les différentes communautés en Ontario. Alors, Michael, dites-nous-en un peu plus.

Ministre Michael Tibollo : Bonjour, je suis Michael Tibollo, ministre associé délégué à la santé mentale et à la lutte contre les dépendances au sein du gouvernement de l’Ontario.

Il est encourageant de constater une sensibilisation et un soutien croissants aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou de dépendances. Les statistiques en matière de santé mentale sont claires : à 40 ans, la moitié de la population aura été frappée ou sera frappée par la maladie mentale. Voilà qui démontre à quel point la santé mentale constitue un enjeu de santé important dans notre province. Nous savons que chaque année, plus d’un million d’Ontariens sont confrontés à des problèmes de santé mentale ou de dépendances. Et la pandémie de COVID-19 n’a fait que contribuer à rendre ces défis plus nombreux et plus complexes.

En cette période difficile, nous sommes conscients que chaque personne est différente dans sa façon de réagir au stress, à l’anxiété et à d’autres troubles de santé mentale. La propriétaire d’une petite entreprise qui se bat pour survivre à travers cette pandémie mondiale… le camionneur de long routier qui est isolé de ses amis et de sa famille… ou l’élève de 11e année qui tente de poursuivre ses études malgré tout. Chacune de ces personnes a des besoins particuliers. Pouvoir les jumeler avec les services et le soutien qui leur conviennent le mieux, le plus près possible de leur communauté, fera une véritable différence dans leur vie.

Voilà pourquoi notre gouvernement investit 194 millions de dollars en financement d’urgence pour les services et le soutien en santé mentale et dépendances. Ces services viennent déjà en aide à plus de 62 000 Ontariens partout dans la province. Avant l’apparition de la COVID-19, nous avions lancé un plan complet visant à combler les lacunes dans les soins et à créer un système de soins interconnectés pour les problèmes de santé mentale et de dépendances. Appelé Vers le mieux-être, ce plan reflète bien les priorités maintes fois exprimées dans le cadre de mes échanges avec les travailleuses et travailleurs de première ligne en santé mentale et dépendances, avec les experts, les personnes qui ont vécu de telles expériences et leurs familles. Notre plan trace une voie claire pour la prise en charge de problèmes de longue date : les temps d’attente sont trop longs, et depuis trop longtemps, les gens sont laissés à eux-mêmes et doivent naviguer dans un système complexe et fragmenté.

Les citoyens qui ont demandé de l’aide ont été confrontés à de nombreux écueils et ont eu de la difficulté à comprendre vers qui se tourner pour obtenir cette aide. Notre gouvernement continue de déployer notre plan, grâce à un financement supplémentaire de 175 millions de dollars, offert par le biais du budget de 2021, pour plus d’aide en santé mentale et en lutte contre les dépendances. Nous investissons donc au total 525 millions en nouveau financement net calculé sur une année pour la santé mentale et les dépendances, ce que nous faisons depuis 2019.

Ce financement est utilisé pour la mise sur pied de quatre nouvelles cliniques itinérantes en santé mentale qui offriront un ensemble complet de services en santé mentale et dépendances à l’intention des personnes vivant dans des communautés éloignées, rurales ou mal desservies… et nous continuons d’élargir les programmes en santé mentale et dépendances destinés aux enfants et aux adolescents, aux étudiants de niveau postsecondaire, aux premiers répondants et aux vétérans. Nous investissons également en gestion de crise par le biais d’un programme de réacheminement afin d’offrir un soutien immédiat aux personnes qui traversent une crise de santé mentale. Pour le déploiement complet de notre plan Vers le mieux-être, nous nous sommes engagés à verser 3,8 milliards de dollars sur dix ans pour créer de nouveaux services novateurs et élargir nos programmes actuels.

En Ontario, le Service de télésanté mentale fait partie de ces services tout à fait uniques, offerts depuis longtemps et que nous aborderons en détail aujourd’hui. Cette approche importante et novatrice vient appuyer les services de santé mentale communautaires à financement public pour les enfants et les adolescents des régions rurales et éloignées de la province. La Télésanté mentale vise à garder dans leur communauté les enfants et les adolescents qui ont besoin de soutien en santé mentale – en accédant à des ressources près de chez eux et en obtenant les services de fournisseurs locaux, ce qui les aide du même coup à éviter que leur problème se transforme en crise. Nous savons que l’on obtient de meilleurs résultats lorsque les services et le soutien sont offerts directement dans la communauté des personnes concernées.

Nous faisons désormais des progrès soutenus grâce à notre plan. Nous sommes en voie d’instaurer des changements concrets et profonds qui permettront aux personnes de tous âges d’être pleinement soutenues à travers leur parcours en santé mentale. Je suis heureux de participer à cette série de balados tout à fait originale sur la santé mentale et les dépendances. Elle nous permet de faire connaître le travail colossal accompli dans nos communautés pour améliorer la prestation de services efficaces en santé mentale et dépendances aux personnes qui en ont besoin et à leurs familles, et ce, partout dans la province. Merci à tous.

Loretta O’Connor : Nous venons d’entendre une excellente introduction concernant le programme novateur que nous vous présentons aujourd’hui. Maintenant, pour nous en dire plus sur le Service de télésanté mentale de l’Ontario destiné aux enfants et aux adolescents, nous allons accueillir le Dr Tony Pignatiello, qui est directeur médical du Service de télésanté mentale depuis 2004 et travaille au Sick Kids Hospital de Toronto.   Nous nous entretiendrons également avec Marc Williamson, psychothérapeute agréé, qui travaille avec le service de santé mentale Algoma Family Services depuis 2003.

Ceci est une traduction d’un balado qui a été enregistré en anglais.

Shawn Fenton : Nous sommes accompagnés aujourd’hui de Tony et de Marc. Merci, messieurs, de vous être joints à nous. Pour lancer la discussion d’aujourd’hui, je voulais demander à chacun de vous d’expliquer votre rôle au sein du Service de télésanté mentale. Parlez-nous donc brièvement de votre expérience personnelle afin que nos auditeurs sachent pourquoi vous faites ce que vous faites.

Dr Tony Pignatiello : Bien sûr, merci beaucoup. Je m’appelle Tony Pignatiello. Je suis psychiatre auprès des enfants et des adolescents. En ce qui concerne le Service de télésanté mentale, je suis ce qu’on appelle le directeur médical du centre du Service de télésanté mentale pédiatrique de la province, qui relève du Hospital for Sick Kids de Toronto. Je suis aussi doyen associé de la santé et responsable des affaires professionnelles des étudiants du programme de médecine de l’Université de Toronto. En ce qui concerne ce programme, j’effectue ce travail pour le Service de télésanté mentale depuis plus de 20 ans. J’ai occupé le poste de directeur médical au cours des 17 dernières années, de sorte que j’ai assisté à la croissance du programme et aux différents changements qui l’ont mené à son état actuel. Ce fut vraiment intéressant et tout à fait stimulant de faire partie du programme et de le voir évoluer.

Qu’est-ce qui m’amène à faire ce que je fais ? Eh bien, je suis psychiatre auprès des enfants et des adolescents. Ma priorité a donc toujours été d’aider les enfants, les familles et les soignants. Il s’agit là du domaine qui me passionne et m’intéresse sur le plan clinique. Je me suis toujours intéressé à l’accès aux services en tant que psychiatre auprès des enfants et des adolescents. J’ai toujours reconnu que nous sommes peu nombreux à exercer la profession et qu’il n’y en aura jamais beaucoup. Pour cette raison, nous sommes une ressource limitée. Et nous devons faire les choses de manière créative et novatrice pour tenter de joindre le plus de monde possible. Même lorsque la possibilité d’un tel programme s’est présentée, c’était logique avec ce que je cherchais à faire, ainsi que pour aider à créer cet accès. À l’époque, c’est-à-dire il y a 20 ans, la notion de vidéoconférence pour offrir des services de santé mentale aux enfants, ou n’importe quel soin de nature médicale, étaient nouveaux et très peu de gens en profitaient. Malgré cela, je trouvais que c’était vraiment une formidable occasion de faire les choses différemment et de sortir des sentiers battus qui, nous l’espérions alors, pouvait faire la différence à plus long terme.

Shawn Fenton : Merci de nous en avoir parlé, Tony. Je voudrais maintenant donner la parole à Marc. Allez-y.

Marc Williamson : Bonjour tout le monde. Je m’appelle Marc Williamson. Je travaille pour Algoma Family Services à Sault Ste. Marie en Ontario, loin dans le nord, dans la région d’Algoma. Je travaille pour l’agence depuis 2003, au début à titre de gestionnaire de cas, mais j’occupe depuis 2006 le poste de conseiller-thérapeute. Je suis ravi d’être ici pour parler de ce service que j’utilise fréquemment et dont je profite, mais surtout, dont mes patients et les gens auprès desquels je travaille profitent également. Qu’est-ce qui m’amène à faire ce que je fais ? Premièrement, j’ai l’occasion d’aider et de soutenir les gens. Je crois qu’il s’agit là d’une chose tout à fait honorable. Je me sens honoré de pouvoir le faire.

Shawn Fenton : Merci beaucoup, Marc. Je veux maintenant céder la parole à Tony. Je sais, Tony, vous avez parlé plus tôt de la façon dont les Service de télésanté mentale se sont, en quelque sorte, développés il y a environ 20 ans. Pouvez-vous nous expliquer ce qui en fait un service novateur et ce qui le distingue des autres services de télémédecine ?

Dr Tony Pignatiello : Donc, si nous revenons 20 ans en arrière, nous étions différents, parce que presque personne ne le faisait. J’ai vu des cas où les gens auraient pu aller jusqu’à acheter de l’équipement de vidéoconférence et le laisser dans la boîte, sans vraiment l’assembler et l’utiliser, parce qu’ils ne savaient pas quoi en faire. Ainsi, au début, je dirais que nous faisions partie des pionniers dans le domaine, alors que nous avons élaboré des directives et piloté différentes choses en ayant recours à divers modèles de prestation des services.

C’était vraiment excitant de nous frayer un chemin dans ce nouveau domaine. L’autre aspect intéressant consistait à essayer de diffuser l’information, de partager les connaissances et d’amener les gens à accepter cette façon de faire. C’était très important, parce qu’au sein des communautés rurales et éloignées que nous desservons, très peu de services de psychiatrie pour les enfants et autres services spécialisés en santé mentale étaient disponibles pour les enfants, les familles et les soignants. C’était donc vraiment fantastique d’établir ces relations, de créer ces liens et de collaborer avec des communautés qui n’y avaient pas accès et de bâtir un service qui allait devenir essentiel. Il ne s’agit plus d’une réflexion après coup. Cela faisait simplement partie de nos activités au quotidien. Ce fut vraiment formidable d’en faire partie et de collaborer à sa réalisation.

Mais avant la pandémie, lorsque nous examinions la façon d’utiliser les soins virtuels, particulièrement dans le domaine de la santé mentale des enfants dans la province, à peine 1 % ou au plus 2 % des visites se déroulaient en virtuel. Ainsi, après seulement 20 ans d’efforts pour en faire la promotion et la mise en marché nous sommes devenus des pionniers dans le domaine. Très peu de choses ont changé sur le plan de la pratique et de l’intégration des soins virtuels à la pratique. Avec la pandémie, les soins virtuels ont été propulsés probablement 50 ans en avant et nous offrons maintenant tous une forme ou une autre de soins virtuels. C’est ce que ça signifiait pour nous, et c’est la raison pour laquelle nous sommes différents. Nous utilisons cette technologie depuis à peine 20 ans. Le passage à la technologie pour échanger avec les patients et les clients n’a pas demandé de changement majeur. Il n’y a pas eu de transition majeure. Au même titre que n’importe qui, nous avons dû examiner divers types de technologies et procéder à différents changements quant à la façon de nous connecter avec nos patients et nos clients. Ainsi, alors que notre programme était toujours axé sur les enfants et sur les familles qui se présentaient dans les agences pour rencontrer le gestionnaire de cas, pour se connecter à nous au moyen de l’équipement des agences, nous devions travailler désormais avec les enfants et les familles chez eux, à la maison, ou dans d’autres situations. Donc, à cet égard, nous n’avons rien de différent des autres. Tous ceux qui offrent des soins virtuels le font maintenant de cette façon. Pour cette raison, nous ne sommes pas uniques; nous serons toujours les pionniers, mais nous ne sommes pas uniques en ce sens.

Ce que notre programme a d’unique, pourtant, c’est que nous sommes essentiellement un modèle de soins partagés qui repose en quelque sorte sur la consultation, alors que nous aidons les fournisseurs de soins primaires au sein des communautés à rester où ils sont. Alors, les fournisseurs de soins primaires sont des gens comme Marc et les agences avec lesquelles nous collaborons : médecins, écoles, jeunes contrevenants. Nous collaborons avec les fournisseurs de soins primaires afin qu’ils puissent faire ce qu’ils font au sein de leur communauté, pour que les enfants et les familles restent au sein de leurs communautés et pour qu’ils n’aient pas à se taper un ou deux jours de déplacement ou qu’ils perdent du temps afin d’utiliser nos services.

Nous offrons également des services d’éducation, d’acquisition de compétences et différents types de consultations indirectes aux gens que nous servons. On a ainsi l’avantage de pouvoir compter sur des gens œuvrant dans différents champs et d’expertise, avec des intérêts variés. Et nous pouvons ainsi traiter pratiquement tous les problèmes qu’on nous soumet. Quiconque est à la recherche d’agences ou de communautés, ou de services, peut essentiellement trouver tout sous un même toit : ils peuvent faire une demande pour être dirigés vers les services qu’il leur faut, et nous partons de là et offrons le service qui correspond à leur demande. C’est donc un peu différent d’un individu ou d’une agence qui cherchent à conclure un contrat unique avec un consultant, alors que tout dépend ensuite de ce contrat.

Shawn Fenton : Merci de nous en avoir parlé, Tony. Je sais que vous avez parlé brièvement de la façon dont la COVID avait touché le Service de télésanté mentale, mais également tous les services à la grandeur du Canada. Je veux maintenant redonner la parole à Marc. Alors qu’Algoma est un organisme de coordination, je veux vous demander, Marc, de nous expliquer brièvement l’effet que la COVID a eu dans votre domaine et la façon dont vous avez vraiment vécu la situation sur le terrain.

Marc Williamson : Eh bien, je peux parler à titre de thérapeute qui travaille auprès des enfants et des familles et de la possibilité de continuer d’offrir des services pendant la pandémie et malgré tous les hauts et les bas, ce qui est ouvert ou fermé – nous avons pu continuer d’offrir ses services par des moyens virtuels. Je crois qu’il est étonnant de constater à quel point les clients avec lesquels je collabore s’adaptent, utilisent ces moyens et apprennent à les utiliser. Ils sont reconnaissants et je suis reconnaissant, à titre de thérapeute, de pouvoir continuer d’offrir mes services de manière sécuritaire. Il s’agit donc d’une transition qui se poursuit.

Shawn Fenton : Tony, je voulais simplement vous offrir la possibilité, si vous avez des idées, de continuer de nous parler des répercussions de la COVID-19 sur votre secteur et la façon dont vous avez vu la situation par le biais du Service de télésanté mentale.

Dr Tony Pignatiello : La façon dont je dirais… Il y a évidemment différentes façons et je commencerais en parlant des enfants, des jeunes et de leurs familles, et de ce que nous avons vu et, vous savez, comme nous le savons assurément tous, les niveaux d’anxiété, et même les abus, et la négligence; ils ont tous augmenté alors que nous traversions tous cette période stressante. Ouais, nous regardons certaines des familles avec lesquelles nous sommes en contact. Dans certains cas, vous êtes impressionné par la façon dont elles se débrouillent, vous savez. Une situation particulière me vient à l’esprit, celle d’une mère monoparentale avec deux enfants à la maison. Et elle doit travailler, parce qu’elle occupe un emploi dans le domaine des services qui ne lui permet pas de rester à la maison. Elle habite dans une petite communauté où les possibilités d’aide pour faire garder les enfants sont rares. Ainsi, elle essaie de jongler avec le travail, les activités à la maison, les enfants qui ont des besoins sur le plan de la santé mentale et qui doivent suivre les cours à la maison pendant un certain temps. Et dans les cas où, vous savez, elle devait amener les enfants à son travail pour faire ce qu’elle a à faire. Et vous entendez ensuite ces histoires et vous ne pouvez que ressentir de la compassion à leur égard. Parce que, vous savez, vous pouvez offrir une sorte de soutien en parlant. Mais en ce qui concerne l’aide sur le terrain, c’est très difficile, en particulier lorsque vous fonctionnez à distance. La communication par des moyens technologiques n’est pas le problème, parce que c’est ce que nous faisons sur une base quotidienne. Mais le besoin, tout à coup, de s’ajuster et d’adopter de nouvelles méthodes de connexion, de faire preuve de créativité dans les situations où vous avez le gestionnaire de cas ou le thérapeute qui ne peuvent se trouver au même endroit, en même temps avec le client, et vous procédez à des connexions en plusieurs points et vous déterminez la façon de gérer les situations possiblement à risque élevé ou urgentes. Je crois qu’il est juste de dire que nous sommes dans un endroit correct maintenant. Nous nous sommes tous ajustés et nous avons fait la transition. Mais je crois bien honnêtement que nous attendons tous que les choses se tassent afin que nous puissions savoir où nous allons nous retrouver, à quoi tout cela ressemblera et comment cela fera partie de nos vies à l’avenir.

Shawn Fenton : Marc, je vous ai vu hocher de la tête à quelques reprises. Je voulais donc simplement vous donner la possibilité de commenter certaines des choses que Tony a partagées et la façon dont vous les interprétez.

Marc Williamson : Vous savez, je crois que Tony a soulevé quelques points extrêmement importants, c’est-à-dire la résilience des clients avec lesquels nous travaillons. De plus, les défis du point de vue du client, mais aussi de notre point de vue avec les équipes de soins étendus et les défis qu’ils doivent relever à tellement de niveaux. Je crois que le Dr Pignatiello vient d’expliquer la situation tellement bien, vous savez, sur les plans économiques, géographiques.... et particulièrement en ce qui concerne la situation familiale. Oui, absolument. Il a vraiment bien soulevé ce point et ça ne faisait pas partie des différentes parties des équipes de soutien qui sont concernées, puisque tous ces éléments sont si importants. Et c’est à ce moment-là que nous parlons de Services de télésanté mentale, vous savez, qui font partie intégrante d’une équipe de soins étendus pour les gens avec lesquels nous collaborons. Il s’agit donc d’un service vraiment précieux.

Shawn Fenton : J’aimerais aborder maintenant un autre sujet et poser une question sur les difficultés que vous avez rencontrées pour la mise en œuvre du Service de télésanté mentale. Quels sont les défis les plus importants sur le plan de la mise en œuvre ?Et comment vous y êtes-vous pris pour les relever ?

Dr Tony Pignatiello : Tout simplement, honnêtement, le plus grand défi que nous avons rencontré surtout au début était l’absence de réponse. Vous savez, lorsque vous avez une idée et vous vous dites, eh bien, essayons-la. Essayons-la. Et il n'était pas rare qu’on nous dise, « non, nous ne pouvons pas faire ça. Eh bien, pour quelle raison ne pouvez-vous pas faire ça ? Parce que nous ne faisons pas ce genre de choses. Parce que nous ignorons comment. Honnêtement, je dirais que le degré de préparation et l’état d’esprit représentaient probablement les principales difficultés. Je crois qu’il s’agit encore d’un des principaux obstacles qui limite une plus grande acceptation. Lorsque vous surmontez ce premier « non, it n’y a plus rien qui vous limite, si ce n’est votre imagination quant à ce que vous pouvez en faire. Et quant à ce que vous pouvez essayer. Un financement prévisible et constant par le ministère a été essentiel dans le cadre de nombreux programmes qui ne sont jamais allés au-delà de la phase pilote. Et en réalité, ils sont demeurés à ce stade faute de financement. Alors, le soutien du ministère, de même que les fonds réservés et l’engagement à l’égard du programme, ont grandement contribué au succès et à la pérennité du programme dès le départ.

Je crois que venait ensuite l’importance de pouvoir compter sur des gens d’optique commune qui partagent un but et une vision identiques, et vous mettez ensuite cette équipe sur pied et vous créez ces relations localement et à la grandeur de la province, ce qui était absolument nécessaire. Et, comme vous le savez, nous avons vu, au cours des ans, que le programme d’examen de télépsychiatrie ou de soins virtuels est l’un de ceux auxquels les gens adhéreront si vous le créez. Nous avons assurément vu des cas où, lorsque nous avons créé un programme, les gens n’y participaient pas. Mais ils commençaient à participer uniquement lorsque nous avons commencé vraiment à travailler sur ces relations. Nous voyons ce phénomène en particulier chez nos collègues autochtones. Nous devons toujours être présents et collaborer avec les aînés, ainsi qu’avec les communautés, et comprendre leurs besoins. Si vous ne pouvez pas compter sur ces premiers éléments du financement garanti, ainsi que sur la relation et l’engagement, sur les buts et la vision identiques, le reste ne viendra tout simplement pas.

Marc Williamson : J’aimerais poursuivre sur ce que Tony vient de dire ici. Vous savez, je crois que nous en avons profité grandement, non seulement moi-même pour mes compétences à titre de thérapeute, mais ultimement les clients. C’était simplement la façon dont les choses fonctionnaient chez Algoma Family Services et nous avons pu tirer parti de ça. Les gens ont embarqué dès le début, et moi aussi.

Dr Tony Pignatiello : J’ajouterais également, vous savez, que c’était vraiment gratifiant de voir, vous savez, Marc qui parlait de l’adhésion précoce au sein de toutes nos agences originales. Tout a commencé par un projet pilote. Et au tout début, ils sont encore nos partenaires très actifs. C’est vraiment enthousiasmant et encourageant de voir que nous n’avons pas rencontré bien des gens en personne. Je sens que nous avons ce lien et que nous faisons partie d’une équipe plus vaste, et il semble qu’ils sont littéralement dans la pièce voisine et non à plusieurs milles ou kilomètres de nous.

Marc Williamson : Absolument. Parce qu’en ce moment même, lorsque nous échangeons à l’écran avec nos clients, nous pourrions nous trouver n’importe où. Je considère souvent que cette question de proximité s’évapore tout simplement. Même plusieurs des supports que nous utilisons maintenant s’évaporent en même temps.

Dr Tony Pignatiello : Et je dois dire, l’autre chose qui a été vraiment formidable a été d’assister à l’évolution de la technologie. Ainsi, au début, on avait Internet par ligne commutée : ce bip reconnaissable et le caractère imprévisible de la connexion, ainsi que les écrans cathodiques et tout ce qui était bizarre à leur sujet. Il a été fascinant de voir la technologie évoluer et s’améliorer pour devenir plus souple et plus facile à manœuvrer. Le nombre de fois où nous étions incapables de nous connecter en raison d’un problème technologique est négligeable.

Shawn Fenton : Je crois maintenant qu’une chose qu’on a dite au sujet de la proximité m’est venue à l’esprit la première fois en ce qui touche les communautés : malheureusement, elles ont été touchées par le problème de la proximité. Alors, de quelle façon le Service de télésanté mentale aide-t-il les communautés autochtones en Ontario ? Y a-t-il un service culturellement sécuritaire disponible; comment ce service permet-il d’harmoniser la médecine occidentale aux pratiques de guérison culturelles ?

Dr Tony Pignatiello : Nous sommes conscients que nous avons une population unique. Nous avons des francophones, des communautés et des populations rurales de banlieue, éloignées et autochtones, et la façon dont le programme est structuré en vertu de ce concept d’agences de coordination, elles existent d’une façon où, dans l’ensemble de la province, on trouve trois agences de coordination qui s’occupent précisément de nos collègues et partenaires autochtones. Je veux dire que tous nos consultants ont suivi la formation sur la sécurité psychologique et culturelle. Au sein de notre groupe de consultants, nous avons un sous-groupe qui a consacré du temps à travailler et à se trouver devant la clientèle en personne, comme consultant au sein des différentes communautés. Nous adoptons également une approche où nous sommes là pour apprendre de nos clients autant que pour leur fournir de l’information. Il y a également des situations où nous devons adopter une approche où l’on fait preuve de curiosité, pour comprendre de quoi il s’agit; nous devons comprendre la façon dont les clients autochtones traduisent ou comprennent les mots, comme par exemple, leur interprétation des hallucinations. Nous devons passer par nos gestionnaires de cas qui agissent parfois non seulement comme interprètes du vocabulaire ou de la conversation, mais également comme interprètes culturels.

Marc Williamson : L’aspect que je souhaite faire ressortir sur cette question est le fait que nous avons tous, chez Algoma Family Services, des employés autochtones qui travaillent vraiment au sein des communautés autochtones locales et ils ont accès aux Services de télésanté mentale. Ils représentent notre lien avec les services. Je crois qu’il s’agit là du maximum que je peux dire, mais nous avons définitivement une communauté de travailleurs qui évoluent au sein des communautés dans notre région, qui ont accès au service et qui en profitent au maximum. Ils se font les défenseurs des besoins de leurs clients.

Dr Tony Pignatiello : Pour ajouter à cela, vous savez, les efforts pour nous faire connaître sur le terrain et pour paver la voie à l’adoption du service sont également des aspects essentiels pour arriver à nous faire inviter dans les communautés et chez les gens.

Shawn Fenton : Je voulais simplement changer de sujet pour parler des clients qui accordent vraiment beaucoup d’importance à cet aspect. Eh bien, le Service de télésanté mentale profite-t-il vraiment aux jeunes enfants ?

Marc Williamson : Très bonne question. En ayant accès à ce service, j’ai vu une évolution de mon point de vue, en première ligne et souvent, très tôt, nous avons parlé d’une sorte de consultation unique avec un psychiatre, et il y avait parfois un suivi. Quand je repense au début de ma carrière, il y avait souvent un moment unique consacré aux recommandations, à la médication pharmacologique et aux autres formes de traitement. Mais, je vois vraiment cette évolution et ce changement. Il s’agit vraiment d’un aspect normal du processus aujourd’hui avec les psychiatres qui sont impliqués, avec les clients et moi qui leur apporte un soutien –c’est ainsi qu’on fait les choses désormais, n’est-ce pas ? Ce ne sont pas les clients qui ont le contrôle, mais bien l’inverse. Nous sommes là pour les soutenir. Il s’agit là d’un processus dans lequel nous pouvons, une fois de plus, nous intégrer et donner une consultation de suivi à un autre moment. Je ne dis pas que ce n’était pas possible il y a 10 ou 15 ans. Mais c’est maintenant presque intégré au processus que dirige le psychiatre concerné. Et également le compte rendu après la consultation avec le client, avec l’enfant, avec le soignant, peu importe de qui il s’agit. S’il s’agit d’un psychologue, tout dépendant du besoin, peu importe qui fait partie de cette équipe et qui a participé, le processus pour faire le point, comment allons-nous procéder pour effectuer un suivi ? À quoi ressemblerait ce processus ? Je veux dire, c’est si riche, pour votre point de vue, et lorsque je regarde vers l’avenir, de vraiment optimiser ultimement cette expérience pour le client.

Dr Tony Pignatiello : Ainsi, le client pourrait absolument être l’enfant, le jeune et sa famille et ce qu’a été l’impact à ce niveau. Je dirais honnêtement que le principal impact se situe au niveau de l’accès. Nous avons des cas où les enfants et les familles ont été incapables de consulter un psychiatre ou un spécialiste de la santé mentale parce que la distance comptait parmi les principaux facteurs. Lorsqu’on habite dans les communautés rurales ou éloignées, vous devez attendre qu’une personne vienne par avion tous les six mois pour une visite rapide ou rien, ou attendre plus longtemps, de sorte que les familles doivent faire leurs bagages et entreprendre le long voyage vers Toronto, London ou Ottawa et prendre de trois à cinq jours de congé. Ce que nous tentons de faire, c’est aider à hausser la confiance et les compétences des fournisseurs de soins primaires qui travaillent parfois avec les enfants, les jeunes et les familles dans des situations complexes et à risque élevé.

Shawn Fenton : Même pour ceux qui sont peut-être en train d’écouter ici et qui se demandent l’avantage que pourrait leur procurer le Service de télésanté mentale. Marc, je viens de vous refiler la question et je vous demande si vous pouvez décrire brièvement le processus et la façon dont on pourrait accéder au service. Pourriez-vous nous expliquer le cheminement du client ?

Marc Williamson : Le cheminement tel que je le connais, parce que je peux parler de mon point de vue à moi, eh bien, par le biais de notre agence, et il existe évidemment dans notre région d’autres agences qui sont capables d’y accéder. Nous sommes définitivement un genre d’agence de coordination, mais ils dirigent les gens chez nous. Mais je sais qu’il y a des médecins, des pédiatres et d’autres agences de services qui ont accès aux départements de santé mentale par le biais des commissions scolaires. Je le fais dans le cadre de consultations, en clinique, en compagnie de tous les clients. Il s’agit là d’un service très rapide. Il se déroule rapidement dans le cadre d’une évaluation générale. Nous pourrions être en train d’envisager de diriger la personne vers une évaluation psychologique, ce qui pourrait prendre jusqu’à un an à l’interne. Mais nous pouvons également accéder, entre-temps à une consultation psychologique, comme solution provisoire. Consulter un département de psychologie. Quelles mesures devrions-nous prendre pour répondre aux questions que vous posez ? Définissez les questions que nous posons et la réponse que le client aimerait obtenir et réunissez le tout. Et, je sais, je peux habituellement avoir un retour après deux à quatre semaines. Nous avons une date.

Shawn Fenton : Alors, Marc, je voulais simplement que vous me parliez de vos expériences au cours des ans. Pouvez-vous nous expliquer quels ont été certains des plus importants défis que les cliniciens et les responsables dans différents cas doivent relever lorsqu’ils tentent de venir en aide aux enfants et aux jeunes en milieu rural et dans les communautés éloignées ?

Marc Williamson : Je crois qu’une partie des défis tient du fait qu’on assiste non seulement au manque de services accessibles, mais nous devons presque jouer le rôle de thérapeutes de première ligne, avec tous les outils, à la manière d’un couteau suisse, parce que dans bien des cas, nous sommes seuls à être à l’avant-scène, nous sommes la seule personne ou la seule agence disponible. Et c’est alors que nous avons besoin de soutien sous forme d’infrastructures, de formation, de consultation. Ce n’est pas correct que nous soyons obligés de porter plusieurs chapeaux. Eh bien, je peux maintenant faire référence à cette autre agence. C’est sa spécialité, mais nous devons être très polyvalents. Ainsi, l’accès au Service de télésanté mentale, la consultation des clients, mais aussi les possibilités de formation sont inestimables.

Shawn Fenton : Alors, Tony, j’ai simplement une question pour vous. Pourriez-vous expliquer aux auditeurs en quoi consiste le programme de formation du Service de télésanté mentale ?

Dr Tony Pignatiello : Nous offrons trois services essentiels. L’un d’eux est le programme de formation. Il s’agit de perfectionnement pour les professionnels en soins primaires, peu importe leur formation antérieure. C’était initialement une chose qui a toujours existé et qui faisait partie du programme depuis les tout débuts. Lorsque nous étions un seul groupe à the Hospital for Sick Kids, nous collaborions avec les agences désignées qu’on nous confiait. Et alors le programme a ensuite évolué pour inclure les trois centres, et nous en avons fait une approche provinciale. Les programmes de formation sont personnalisés et adaptés de manière à répondre à certaines demandes que nous formulons, parfois une séance d’éducation ponctuelle. Nous préférons habituellement organiser une série de trois ou quatre séances, alors que nous misons sur l’information de la séance précédente et nous insistons pour qu’elles soient aussi interactives que possible. Et ensuite, je devrais ajouter, nous ne leur facturons aucun montant. Tout est couvert dans le budget du programme.

Shawn Fenton : Qui fournit la technologie et l’équipement pour le Service de télésanté mentale ?

Dr Tony Pignatiello : C’est surtout le Réseau Télémédecine Ontario qui a fourni l’équipement ou qui peut nous aider à y accéder. Il assure la connectivité et fournit une connexion sécurisée. Il est le principal fournisseur de services.

Shawn Fenton : Et Marc, je m’adresse maintenant à vous. De quelle façon le Service de télésanté mentale a-t-il permis de combler les lacunes sur le plan des services, plus précisément à Algoma ?

Marc Williamson : Eh bien, la première lacune qui me vient immédiatement à l’esprit est le manque de services de psychiatrie pour adolescents au sein de la communauté. Et, vous savez, ce fut là un véritable problème. Nous avons maintenant un peu corrigé la situation. Nous avons un psychiatre qui nous rend visite tous les trois mois en avion, mais il fonctionne évidemment de manière virtuelle pour l’instant. Et au cours de la dernière année, nous avons eu accès à un psychiatre à l’hôpital de la région de Sault [Ste. Marie]. Mais pour bénéficier de consultations en psychiatrie, il est relativement le seul en ville. Les gens ne se ruent pas à nos portes, comme je l’ai dit déjà. Une fois tous les trois mois, ça nous permet de revoir la situation du point de vue clinique et de rencontrer le patient à l’hôpital où il se trouve. Ainsi, cela nous donne la flexibilité de bénéficier d’un service rapide et de la plus haute qualité qui soit pour le client. Nous avons donc besoin de services de psychiatrie pour les enfants et les adolescents. Donc le Hospital for Sick Kids, par le biais du Service de télésanté mentale, dans les trois centres, est extrêmement précieux, comme le dit le Dr Pignatiello. Et c’est au sein d’une communauté, de 80 000 personnes. Je ne peux même pas imaginer à quel point c’est important, se rendre dans le Grand Nord au sein de communautés plus rurales. La formation, les possibilités de formation, je suis une personne reconnaissante lorsque je reçois des courriels. Ce sont là des possibilités et, en tant que consommateur, je peux choisir.... Est-ce que cela répond à un besoin actuel ? Vous savez, à titre d’agence, Algoma Family Services offre beaucoup de formation interne avec notre département de psychologie et autrement, mais c’est si merveilleux de disposer d’un menu variable dont je suis informé. Je suis donc extrêmement heureux de pouvoir choisir ce qui répond, vous savez, à mes besoins en formation et qui est tout le temps.

Shawn Fenton : Je sais, Marc, vous êtes là depuis très longtemps. Je voulais donc vous présenter certains points de vue à l’intention des auditeurs sur la façon dont ce service a évolué à Algoma.

Marc Williamson : Depuis que j’ai commencé en 2003, et comme le Dr Pignatiello l’a déclaré, ça existait déjà auparavant. Mais c’était entièrement opérationnel dans mon agence au moment où j’ai commencé à cet endroit. Alors, c’est merveilleux.... On y avait accès peu de temps après. Du point de vue technologique, le service a connu une croissance fulgurante. Et je ne peux dire combien de fois on a tenu des consultations à notre agence, ou dans l’immeuble où se trouve nos bureaux, avec les fils qui serpentaient, et les techniciens de TI qui couraient dans les escaliers pour tenter de faire fonctionner les choses. Ce genre de problèmes a été plus ou moins écarté. Ce sont donc des progrès technologiques dont nous avons tous profité. J’apprécie tellement que ce soit le psychiatre consultant qui déclare souvent « c’est ce que je crois que nous devrions faire, un contrôle, environ à cette date. Ou si ce n’est pas, sur le plan temporel, lorsqu’il s’agit d’évaluer à un certain point, le moment où nous devrions procéder de nouveau à un examen. Nous verrons à quelle étape en est le traitement lorsqu’il s’agit d’assurer un équilibre entre le besoin d’une thérapie et la médication. Il serait donc intéressant de savoir qui devrait y être, à quel point les choses ont évolué, qui est impliqué, quel personnel de l’école s’y trouve, si un médecin est incapable d’assister en raison de sa charge de travail, pour les tenir au courant, et non seulement au moyen des consultations retransmises au médecin impliqué, mais pour faire la lumière sur sa participation. Vous savez, c’est devenu vraiment éclectique : qui peut jouer les rôles et à quoi cela devrait-il ressembler, la protection de l’enfance a-t-elle un rôle à jouer à ce niveau ? C’est donc très vaste lorsqu’il s’agit de répondre aux besoins de l’enfant et de la famille. Et c’est tout simplement étonnant.

Shawn Fenton : Qu’est-ce qui explique le succès du Service de télésanté mentale d’après vous ?

Dr Tony Pignatiello : Le respect du mandat. Ainsi, le mandat donnait accès aux services lorsque cet accès était auparavant impossible. Je crois que nous y sommes arrivés en réalisant des progrès formidables. Et je crois que nous sommes arrivés au point où on nous voit comme un membre à part entière des communautés. Nous ne sommes plus le résultat d’une réflexion après coup. Nous faisons partie de l’agence, de la famille. Cela fait simplement partie de la façon dont les choses se déroulent. Je crois qu’il s’agit là probablement d’une des plus importantes façons de mesurer le succès : cette intégration complète aux systèmes locaux s’est vraiment bien réalisée et est axée sur la collaboration.

Shawn Fenton : Merci de nous en avoir parlé, Tony. Et je vais simplement céder la parole à Marc ici. Marc, avez-vous d’autres histoires à succès au sein du Service de télésanté mentale dont vous aimeriez nous entretenir ?

Marc Williamson : Je crois, en termes d’histoires à succès, que cela fait simplement partie d’une vaste équipe de soutien, de la capacité d’accéder, vous savez, à ce niveau de consultation psychiatrique. Et ne vous méprenez pas. Les clients vivant dans le Nord sont vraiment très conscients de leur situation géographique et de leur éloignement par rapport à l’Ontario, qui est axée sur Toronto. Et vous savez, ils reconnaissent et apprécient le fait de bénéficier de ce niveau de service sans devoir se déplacer à l’extérieur de la communauté, comme l’a relevé le Dr Pignatiello. Ils apprécient grandement de bénéficier d’un tel niveau de service, vous savez, depuis Toronto, qui fait partie de leur équipe de soins étendue.

Shawn Fenton : D’après votre expérience professionnelle, de quelle façon la toxicomanie dans le secteur de la santé mentale des enfants et des adolescents et la demande de services ont-elles évolué au cours des ans ?

Dr Tony Pignatiello : On voit sans doute moins de ce qu’on pourrait qualifier des problèmes de comportement avec le temps. Mais nous avons également assisté à une augmentation de la connaissance et de la conscience des parents, qui se penchent davantage sur les problèmes de leur jeune, et à une augmentation de la demande de services. Je crois qu’il s’agit plutôt d’un déplacement du point d’équilibre, si vous voulez.

Marc Williamson : J’aimerais simplement ajouter un mot, du point de vue du personnel de première ligne, sur ce que le Dr Pignatiello vient d’exprimer, de ma simple perspective. Il a abordé un point vraiment important et, faute d’avoir un terme plus précis, je crois qu’on a assisté à une baisse des préjugés; l’acceptation du fait que s’occuper de la santé mentale d’un individu est tout aussi important que de s’occuper de sa santé physique, dans des contextes différents, aux yeux des parents, des soignants, des écoles, de la communauté médicale ce qui a mené à une ouverture d’esprit face à la demande pour des services, qui entraîne bien des pressions internes sur la capacité d’offrir ce dont les gens ont vraiment besoin. C’est si intéressant, lorsque je parle en termes de génération... Prenons, par exemple, une séance qui avait lieu hier soir avec un parent et un adolescent, alors que le parent disait, vous savez, je reçois un soutien en santé mentale et nous pouvons sympathiser avec le jeune qui, en tant qu’auditoire, entend parler de ce changement chez le parent. N’est-ce pas que c’est valorisant pour le jeune d’entendre une telle chose de la part de son soignant qu’il affectionne. Et c’est cet effet de l’acceptation qui a des retombées, qui est valide et qui représente un soutien nécessaire.

Shawn Fenton : Pour ceux qui se trouvent dans des provinces différentes, sur des territoires différents et qui entendent le point de vue de l’Ontario sur les Services de télésanté mentale, je voulais simplement vous demander à tous les deux : qu’est-ce que les autres provinces et territoires devraient mettre en place s’ils envisagent d’offrir un service comparable ?

Dr Tony Pignatiello : Je crois honnêtement que la principale chose est d’assurer que les ressources permettant de soutenir un programme comme celui-ci sont disponibles, parce qu’elles représentent vraiment le point de départ. Vous savez, j’ai vu d’autres programmes qui disposaient de tout et qui étaient prêts à mettre en œuvre, mais ils n’avaient pas les fonds nécessaires. Et je crois qu’il doit s’agir là du point de départ; les fonds suffisants et réservés à cette fin doivent être disponibles. Cela doit faire partie d’une stratégie plus vaste pour démontrer la pertinence, l’importance et la priorité accordée à une telle chose. Et je crois que vous devez cibler les chefs de file à tous les niveaux; vous en avez besoin comme fournisseurs centraux, vous en avez besoin à l’échelle locale et en première ligne. Et si vous travaillez au sein de populations uniques et spécifiques, vous avez également besoin de chefs de file au sein de ces populations; par exemple, avec les communautés autochtones et francophones, vous savez, dans notre province.

Shawn Fenton : Donc, si nous regardons vers l’avenir, soit un an, cinq ans, dix ans, je voulais vous demander à tous les deux : qu’espérez-vous en ce qui concerne l’avenir de Service de télésanté mentale ?

Dr Tony Pignatiello : Je crois que les soins virtuels trouveront leur place dans les services de santé mentale. Je veux dire, non seulement pour notre programme, mais comme concept général. Avant la pandémie, disons lorsque l’acceptation était limitée, nous étions toujours conscients du fait que les soins virtuels sont, évidemment, ce qu’il y a de mieux après les soins en personne. Ils améliorent ce qui existe déjà. Ils ne le remplacent pas, mais ils l’améliorent tout simplement. La pandémie nous a obligés, en quelque sorte, à faire les choses un peu différemment. Elle nous a forcés à être l’endroit où cette connexion, où les soins sont offerts, de sorte que je crois que c’est un peu artificiel. Je crois que nous atterrirons dans un endroit où nous trouverons un genre d’hybride, un mélange raisonnable. Nous deviendrons de plus en plus à l’aise avec les choses qui se font mieux en personne et celles qu’on peut faire correctement avec une approche axée sur les soins virtuels. Je prédis que nous allons assister à ce genre de choses dans une proportion de près de 70/30 ou 60/40, c’est-à-dire de 60 à 70 % en personne et de 30 à 40 % en virtuel, et je crois que c’est à ce niveau que les choses se stabiliseront.

Shawn Fenton : Et je demande également à Marc, d’ici cinq ans, un an ou dix ans, où voyez-vous ce service et le soutien aux clients ?

Marc Williamson : Vous savez, lorsque je repense à la situation il y a dix ans, cinq ans, trois ans, l’utilisation d’un support virtuel était réservée aux consultations psychiatriques du Service de télésanté mentale. Maintenant, c’est la norme. On le retrouve partout. C’est donc « et aussi et non » la place de. Il s’agit d’un autre outil utile dans notre coffre à outils, et la pandémie a rendu son utilisation normale. Et pour bien des gens, elle a sa place. Nous devons continuer d’écouter les clients.

Shawn Fenton : Je vous remercie, Marc. Et je crois, alors que nous récapitulons, nous ne savons jamais qui peut écouter ce balado. Alors, si une personne a cherché de l’aide dans le système, aimeriez-vous conclure en adressant un mot à ceux qui traversent peut-être maintenant ou qui ont traversé une crise de santé mentale ?

Dr Tony Pignatiello : La principale chose que j’aimerais dire est la suivante… Vous n’avez pas besoin d’être seul dans une telle situation. Et évidemment, demandez de l’aide, n’importe où, à n’importe qui, que ce soit un membre de la famille, un médecin, un enseignant, un ami, une personne en qui vous avez confiance, un adulte de confiance, peu importe qui, mais demandez de l’aide. Et vous n’obtiendrez peut-être pas ce dont vous avez besoin ou ce que vous souhaitez dès la première tentative, mais espérons qu’on pourra vous orienter au bon endroit, vers le bon service et le bon soutien. Et pour ceux qui habitent dans des communautés rurales et éloignées, les agences de santé mentale qui se trouvent près de chez vous offrent des services d’intervention, et il y a des aînés (des sages) dans ces endroits. En définitive, le mieux-être mental et le bien-être mental sont la responsabilité de tous un chacun. Dans les cas de maladie et les situations plus graves, il existe assurément un spécialiste qui doit s’impliquer pour vous aider. Mais autrement, c’est la responsabilité de tout le monde et il faut vraiment un village et une communauté pour que les choses restent ainsi.

Marc Williamson : Le message que je livre aux clients restera le même : nous avons tous une santé physique; que nous avons tous une santé mentale. Nous sommes des êtres humains doués de sentiments et nous méritons tous qu’on nous soutienne à ces deux niveaux lorsque nous en avons besoin. Je crois qu’il devient plus facile et plus transparent de naviguer dans le système. Mais demandez de l’aide, cherchez les possibilités et prenez des décisions éclairées. Mais s’il y une chose qui est méritée, vous la méritez. Nous méritons tous qu’on nous soutienne lorsque nous en avons besoin.

Shawn Fenton : C’est absolument vrai. C’est comme si vous n’étiez pas seul. Et vous méritez un soutien et des possibilités de développer votre bien-être mentalement. Je crois donc que les deux messages finaux représentent la clé pour les gens qui traversent une crise ou qui pourraient vivre une telle crise en cours de route. Alors je vous remercie grandement, Tony et Marc, d’avoir pris part à cette conversation. Elle est vraiment nécessaire. Et j’espère vraiment réduire ainsi les préjugés entourant la maladie mentale et permettre à ceux qui vivent une telle situation de savoir qu’ils ne sont pas seuls et que nous sommes en mesure de les entendre et de les écouter ici en Ontario et au Canada. Merci beaucoup de votre temps, Marc et Tony, et merci également aux auditeurs.

Dr Tony Pignatiello : Ce fut un plaisir pour moi.

Marc Williamson : Pour moi aussi, vraiment.

Loretta O’Connor : Merci d’avoir aidé nos auditeurs à mieux comprendre en quoi consiste le Service de télésanté mentale de l’Ontario pour les enfants et les adolescents. Voilà un récit qui témoigne d’une belle réussite, qui saura certainement faire figure d’exemple pour bien d’autres projets. Soyez à nouveau des nôtres la semaine prochaine alors que nous nous dirigerons vers l’est du pays pour vous parler de l’approche de la Nouvelle-Écosse pour résoudre le problème des temps d’attente pour des services en santé mentale et dépendances au Cap-Breton. Merci de nous avoir écoutés!

 

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