PRATIQUES PROMETTEUSES
Un balado sur la santé mentale et les dépendances

Épisode 10 : Nunavut

Épisode 10 : Guérison (NU)

27 mai 2021 – Découvrez l’expérience du Nunavut avec les programmes de guérison offerts à sa population. Nous verrons alors en quoi consistent les approches adoptées par le Nunavut pour réduire la stigmatisation souvent associée à la recherche de soutien en matière de santé mentale et de dépendances, et nous découvrirons des moyens novateurs de soutenir ceux qui en ont besoin, en particulier les jeunes.

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Loretta O’Connor : Bienvenue à nouveau dans le balado Pratiques prometteuses. Voici maintenant le dixième des 13 épisodes de cette série sur la santé mentale et les dépendances.

Cette série de balados est un projet mis sur pied par les premiers ministres des provinces et territoires. Elle vise à faire connaître les pratiques prometteuses qui ont cours à l’heure actuelle dans chaque province et chaque territoire. Dans chaque épisode, nous vous présentons des experts du secteur et nous vous en dirons plus sur des pratiques et programmes novateurs.

Je suis Loretta O’Connor, directrice générale du Secrétariat du Conseil de la fédération, un organisme qui appuie le travail des premiers ministres des provinces et territoires. L’objectif des premiers ministres avec ce balado est de réduire les préjugés associés à la maladie mentale et aux problèmes de dépendances et de favoriser, entre les provinces et les territoires, une approche plus ciblée et axée sur la collaboration.

Aujourd’hui, nous sommes au Nunavut, un territoire immense et peu peuplé du nord du Canada. Toutes les communautés du Nunavut sont éloignées, isolées et uniquement accessibles par voie aérienne, ce qui complique particulièrement les services de livraison. Près de la moitié de la population du Nunavut est âgée de moins de 25 ans. Les gens du Nunavut sont « tricotés serrés », si je puis dire, et sont également résilients et bienveillants, généreux et d’une grande gentillesse. Toutefois, ici comme ailleurs, des préjugés persistent concernant la santé mentale et les dépendances. Divers facteurs sociaux contribuent à rendre la situation au Nunavut plus difficile que dans d’autres régions du pays. Bien des gens vivent par exemple dans des maisons surpeuplées ou ont des difficultés économiques, et dans beaucoup de familles, il est souvent difficile de mettre de la nourriture sur la table, entre autres. Ces facteurs font en sorte que le taux de suicide au Nunavut est plus élevé que la moyenne nationale.

J’aimerais rappeler à tous nos auditeurs que si vous vivez des difficultés ou si c’est le cas pour une personne que vous connaissez, de l’aide est disponible. N’hésitez pas à demander de l’aide si vous en avez besoin. Appelez la ligne d’aide Kamatsiatut au 1 800 265-3333, ou la ligne Jeunesse, J'écoute! au 1 800 669-6868. Pour des ressources en ligne, consultez le site Web wemattercampaign.org/fr.

Nous allons maintenant commencer cet épisode en accueillant le premier ministre du Nunavut, monsieur Joe Savikataaq, qui nous présentera le Nunavut, sa population et nous parlera de l’importance accordée à la prestation de services en santé mentale et dépendance pour les personnes qui en ont besoin.

Ceci est une traduction d’un balado qui a été enregistré en anglais.

Premier ministre Joe Savikataaq : Bienvenue au balado du Nunavut sur la santé mentale et les dépendances. Je suis Joe Savikataaq, le premier ministre du Nunavut. Dans notre balado, vous entendrez probablement le mot Nunavummiut. Il s’agit d’un terme inuktitut très répandu que nous utilisons lorsque nous parlons des résidents du Nunavut.

Le Nunavut est la juridiction dont la population est la plus petite au Canada, avec environ 40 000 résidents, répartis sur une grande masse terrestre du Canada. C’est la seule juridiction où les 25 communautés sont éloignées et isolées. Cela signifie que les 25 communautés du Nunavut ne sont accessibles que par avion – nous n'avons pas de routes et aucune connexion entre nos communautés.

Le Nunavut est une juridiction unique au Canada. Il compte le plus fort pourcentage d’Autochtones, environ 85 % de la population étant inuite. Il compte également le plus fort pourcentage de locuteurs de langues autochtones, et environ 70 % des Nunavummiuts parlant les langues inuktitutes – l’inuktitut et l’inuinnaqtun. Le Nunavut a quatre langues officielles, l’inuktut, ainsi que l’anglais et le français.

L’éloignement de notre territoire, la démographie de notre population et nos exigences linguistiques uniques signifient que nous devons trouver des moyens uniques de fournir des services de santé mentale et de lutte contre les dépendances aux Nunavummiuts. Nous devons souvent fournir des services de santé mentale et de lutte contre les dépendances qui sont culturellement adaptés à la population majoritairement inuite. Cela signifie également que les services que nous fournissons sont dans la langue inuktut.

De plus, nous devons souvent trouver des moyens uniques de fournir des services de santé mentale et de lutte contre les dépendances à nos collectivités éloignées et isolées. Nous offrons des services virtuels et mobiles et, lorsque cela n’est pas possible, les Nunavummiuts doivent parfois parcourir de longues distances pour accéder à des services de santé mentale et de lutte contre les dépendances dans d’autres collectivités. Nous sommes fiers des services de santé mentale et de lutte contre les dépendances que nous offrons aux Nunavummiuts.

Dans notre balado, Victoria Madsen, sous-ministre adjointe d’Inuusivut pour le ministère de la Santé, s’entretiendra avec Jukipa Kotierk, spécialiste des programmes de bien-être, et Sheila Schweder, travailleuse sociale auprès des enfants et des jeunes. Nous espérons que vous apprécierez notre balado et que vous en apprendrez davantage sur les services extraordinaires que nous offrons aux Nunavummiuts.

Loretta O’Connor : Nous venons d’entendre le premier ministre Savikataaq qui nous a parlé des défis particuliers et tout à fait uniques auxquels le Nunavut est confronté pour la prestation de services en santé mentale et dépendances. Je vous présente maintenant le ministre de la Santé du Nunavut, monsieur Lorne Kusugak, qui est aussi ministre responsable de la prévention du suicide. Monsieur Kusugak nous en dira plus sur la prise en charge des problèmes de santé mentale au Nunavut et sur l’objectif ultime d’offrir l’aide et les ressources nécessaires pour rendre les familles et les communautés plus fortes.

Ministre Lorne Kusugak : La santé mentale est un élément important du bien-être de chacun, et c’est un aspect des soins dans lequel le ministère de la Santé s’est engagé. Nous savons que les Nunavummiuts sont aux prises avec des problèmes qui contribuent à des taux élevés de dépendance et de suicide. Comparativement au reste du Canada, les Nunavummiuts, et en particulier les Inuits, sont aux prises avec des taux de dépendance et de suicide qui seraient plus élevés que ceux de leurs pairs canadiens. Ces statistiques malheureuses sont exacerbées chez les jeunes, qui représentent près de 40 % de la population du Nunavut.

Nous savons que l’état de la santé mentale au Nunavut est influencé par une variété de facteurs, et qu’il s’agit d’une question complexe. Les logements surpeuplés et inadéquats, la sécurité alimentaire précaire, le chômage et les traumatismes multigénérationnels contribuent tous aux difficultés auxquelles les Nunavummiuts sont confrontés.

Pour lutter contre les méfaits de la dépendance et du suicide, notre objectif est de fournir aux Nunavummiuts le soutien et les ressources nécessaires pour prendre soin de leur santé mentale, et pour construire des familles et des communautés plus fortes. Nous nous efforçons de rendre ces soutiens disponibles ici, au Nunavut, dans la mesure du possible, car nous savons que les gens réussissent mieux lorsqu’ils sont soutenus par leur famille, leurs amis et leur communauté. Dans les cas où nous ne pouvons pas fournir le soutien au Nunavut, nous avons des partenariats solides avec des établissements et des professionnels du Sud qui assurent l’accès à des soins de qualité indispensables.

Pour résoudre ces problèmes, il faut non seulement une approche pangouvernementale pour aborder les questions que j’ai mentionnées, mais aussi une meilleure reconnaissance et des ressources de la part du gouvernement fédéral, qui a une responsabilité envers les Inuits du Canada.

Il y aurait beaucoup à dire sur le sujet de la santé mentale au Nunavut, mais j’espère que cet aperçu a permis de faire la lumière sur les problèmes auxquels nous sommes confrontés et sur le travail que nous faisons pour les résoudre.

Loretta O’Connor : Merci, monsieur Kusugak pour cet excellent survol.

Maintenant, j’aimerais vous présenter madame Victoria Madsen, sous ministre adjointe et responsable de la santé mentale et de la lutte contre les dépendances pour le Nunavut. Mme Madsen s’entretiendra avec deux personnes qui travaillent sur le terrain afin d’offrir des services de santé mentale au Nunavut. Nous entendrons d’abord Sheila Shweder. Sheila est travailleuse sociale auprès des enfants et des jeunes dans la communauté éloignée de Rankin Inlet, qui est accessible uniquement par avion. Nous entendrons aussi Jukipa Kotierk. Jukipa est spécialiste des programmes de bien-être à Iqaluit, capitale du Nunavut. Nous allons maintenant commencer avec la présentation de Victoria.

Victoria Madsen : Bonjour, je suis Victoria Madsen. Merci de vous joindre à nous pour le balado des pratiques prometteuses du Nunavut. Nous allons parler à deux femmes de deux collectivités : l'une vient de Rankin Inlet, dans la région de Kivalliq, et l'autre de la capitale du territoire, Iqaluit. Ces deux femmes ont élaboré et mis en œuvre des programmes visant à aider les Inuits du Nunavut à faire face aux pressions d'aujourd'hui et aux traumatismes du passé. Leur créativité est applaudie, car la mise en place de programmes est difficile dans nos communautés isolées, en raison du peu de fournitures, du manque de personnel et de la difficulté à trouver des espaces pour les rassemblements. Écoutons ce qu'elles ont accompli et pensons au nombre de personnes qu'elles ont aidées.

Sheila Schweder : Je m'appelle Sheila Schweder. Je suis née et j'ai grandi à Rankin Inlet, au Nunavut. Nous avons une population de 3 633 habitants. La ville elle-même a été fondée par les propriétaires de la mine de Rankin Inlet, juste au nord de Johnson Cove, à partir de 1957. La mine produisait des minerais de nickel et de cuivre à partir d'une exploitation souterraine. La mine a été le premier cas de mineurs inuits au Canada. Lorsque la mine a fermé en 1962, Rankin comptait une population d'environ 500 Inuits, et 70 à 80 % d'entre eux avaient été des travailleurs de la mine. Cela inclut mes défunts grands-parents Alphonse Naqulisik et Charlie Schweder.

Rankin Inlet est également le centre de sept collectivités développées : Arviat, Baker Lake, Chesterfield Inlet, Coral Harbour, Naujaat, Whale Cove. Rankin Inlet, étant la plaque tournante, est le seul endroit où l’avion atterrira. Ils utilisent un avion plus petit, Calm Air, pour se rendre dans les collectivités développées. Je suis à l'écoute et je m'implique activement dans ma communauté en tant que travailleuse sociale auprès des enfants et des jeunes, où je gère des programmes, et en tant que membre de l'autorité scolaire du district, avec trois écoles dans notre communauté. L'autre comité dont je fais partie est le comité de justice communautaire. Nous avons aidé à soutenir des individus en utilisant la justice réparatrice.

Je pense que le fait d'avoir des services de soutien et de gérer des programmes au sein de notre communauté aide les individus. Comme beaucoup de Canadiens, j'ai eu des problèmes de santé mentale. J'ai cherché l'aide et le soutien dont je savais avoir besoin et j'ai fini par surmonter mes difficultés. Comme nous le savons tous, les problèmes de santé mentale ont un impact sur beaucoup d'entre nous qui avons des problèmes de santé mentale ou de dépendance. J'ai l'impression que c'est encore plus difficile lorsque nous vivons dans une communauté isolée qui n'est accessible que par avion, ou de façon saisonnière aux autres collectivités développées, par bateau ou en motoneige. Cela crée des obstacles à l'accès aux services. D'une part, nous disposons d'une communauté très unie pour nous soutenir ; d’autre part, le manque d'intimité peut créer des obstacles pour faire face à toute situation et tenter d'obtenir des ressources.

Victoria Madsen : Sheila, nous savons que parfois les gens n'ont pas accès aux services de santé mentale en raison de la stigmatisation. Comment contournez-vous cet obstacle ?

Sheila Schweder : Ce qui, à mon avis, contribue à la déstigmatisation, c'est la mise en place de programmes permettant de nouer de nouvelles amitiés, tout en apprenant une nouvelle activité comme la couture à la main ou à la machine à coudre. Lorsque les personnes arrivent pour la première fois aux programmes proposés, elles ne savent pas comment relier les pièces, comment demander de l'aide pour relier ces pièces afin de réaliser leur projet, comme les défis de notre vie personnelle. Nous ne sommes pas sûrs parce qu'il est difficile de faire le lien entre de nouvelles situations, notre esprit et notre corps pour nous adapter aux défis de la santé mentale.

Une fois que nous sommes capables de communiquer avec d'autres personnes, les choses prennent un sens plus clair. Au lieu de repasser dans notre esprit, nous pouvons adopter un mode de vie sain, en apprenant comment nous pouvons réussir à rassembler les morceaux, grâce aux fournisseurs de services de notre collectivité : Santé mentale, Services aux victimes, programme de lutte contre la violence conjugale, programme de toxicomanie des adultes avec l'église baptiste, travailleur de proximité avec le ministère de la Justice, les conseils et services de Kivalliq gérés par le Centre d'amitié de Pulaarvik, avec des travailleurs de soutien culturel, sont quelques-uns des services que Rankin Inlet a à offrir.

Victoria Madsen : Outre les nouvelles compétences, qu'est-ce que les gens acquièrent grâce à ces programmes ?

Sheila Schweder : Cela dit, une fois le programme terminé, nous créons de nouvelles amitiés et de nouvelles compétences à ramener chez nous, comme de nouveaux mythes et une nouvelle compréhension qu'après tout, nous ne sommes pas seuls, car nous avons des techniques d'apprentissage différentes. Et nous pouvons être fiers de cette initiative : notre culture nous aide à préserver notre santé mentale, en cousant pour nos proches pendant les longues saisons d'hiver, ou un doudou pour notre bébé pendant les saisons plus chaudes.

Victoria Madsen : Ces programmes sont vraiment nécessaires et merveilleux. Qu'avez-vous pu offrir d'autre à la population de Rankin Inlet ?

Sheila Schweder : D'autres programmes organisés par le service de santé mentale de notre collectivité, comme la « Semaine de la vie » ou « Embrace Life Week », au cours de laquelle nous avons pu exprimer notre soutien en décorant nos fenêtres de citations et d'images. Et à la fin du mois, nous avons tiré au sort des noms avec une chance de gagner quelques prix en reconnaissance de leur soutien. Et à la fin de la semaine, nous avons organisé une « marche de la vie » communautaire ou « Embrace Life Walk », qui, à mon avis, a aidé les personnes qui y ont participé et qui ont perdu un être cher par suicide. Je pense que nous avons tous un parcours de vie. Et lorsque nous sommes prêts à changer, nous cherchons à comprendre notre chagrin de bien des façons, à faire face. Et c'est un moyen qui a aidé beaucoup de gens.

Victoria Madsen : Sheila, y a-t-il des programmes de santé mentale pour les enfants du Nunavut ?

Sheila Schweder : Nous avons également aidé les enfants et les jeunes en lançant un programme de mentorat. Les Inuits vivent avec le traumatisme intergénérationnel des pensionnats, qui a eu un impact considérable sur les pratiques parentales, l'éducation des enfants, la langue maternelle, l'identité et la compréhension des deux mondes dans lesquels ils vivent. Les Inuits étaient des artistes résilients, des nomades qui ont survécu sur la terre pendant des décennies avant les pensionnats. Le premier pensionnat a été créé dans les années 1950 à Chesterfield Inlet, et a fonctionné jusqu'en 1969. La tuberculose a également touché de nombreux Inuits, qui ont quitté leur foyer à un très jeune âge pour une très longue période, ce qui a affecté l'attachement et le repli sur leur culture.

Lorsque nous avons dirigé le programme de mentorat, nous les avons félicités pour leur participation, pour s’être entraidés, pour avoir mangé un repas, pour avoir fait de l'artisanat et pour avoir travaillé en groupe, sans intimidation, et nous avons fait en sorte que cela soit amusant pour tout le monde. Des jeunes de l'école secondaire ont été formés et embauchés pour gérer le programme extrascolaire du lundi au vendredi. Cela a permis de renforcer l'estime de soi, de comprendre que l'on peut demander de l'aide, de se donner les moyens d'être un grand frère ou une grande sœur dans la communauté, même s'ils se voient dans la communauté.

Cela a permis à tous ceux qui ont participé au programme de comprendre et d'apprendre en tant que groupe ; nous avons organisé ce programme pendant trois ans dans notre collectivité. Cette année, j'ai formé le personnel du centre d'accueil postscolaire local, afin que le hameau local puisse essayer de gérer à nouveau le mentorat postscolaire. Cela permettrait de favoriser les comportements cognitifs pour tous les âges. Les jeunes qui ont fait l'éloge des enfants et des jeunes qui ont assisté à l'événement en ont également tiré profit pour eux-mêmes, en remarquant la bonne cohérence, en ayant une routine structurée, en gagnant de nouvelles amitiés et un soutien continu dans notre communauté. J'espère vous avoir inspiré par notre culture et notre communauté. Continuez à grandir et à apprendre en écoutant.

Victoria Madsen : Absolument. Cela a été une source d'inspiration. Merci, Sheila.

Sheila Schweder : C'était un plaisir, Victoria.

Victoria Madsen : Bonjour, Jukipa. Nous sommes ravis d'entendre parler des programmes que vous avez contribué à concevoir et à mettre en œuvre pour les Inuits du Nunavut. Pouvez-vous d'abord nous parler un peu de la programmation terrestre ?

Jukipa Kotierk : Merci de me recevoir. Je m'appelle Jukipa Kotierk. Le programme de traitement terrestre du Nunavut est basé sur le Programme Connections existant qui a été mis en œuvre avec succès à Cambridge Bay, au Nunavut. Il est en cours de révision pour mieux refléter la culture inuite à travers le Nunavut, avec des représentants de chaque centre régional de mieux-être. Il est basé sur une programmation à la fois clinique et culturellement appropriée. Ce programme est conçu pour répondre aux besoins des Inuits du Nunavut. Il en est actuellement à ses débuts, et il a été offert à Kanngiqtugaapik, ou Clyde River, au Nunavut, avec la Ilisaqsivik Society. Il est également prévu de l'offrir à Cambridge Bay, avec le ministère de la vie saine, ainsi qu'au Centre d’amitié Pulaarvik Kablu au cours de l'année à venir. Le programme est fondé sur une approche adaptative qui tient compte des distinctions régionales et saisonnières afin de répondre aux besoins de tous les Nunavummiut. La flexibilité est un atout fonctionnel et fait partie de la structure fondamentale du programme.

Victoria Madsen : Merveilleux. Pouvez-vous me parler un peu de vous et du travail que vous avez fait avec les programmes de traitement au Nunavut ?

Jukipa Kotierk : En tant que membre de la communauté, j'accorde une grande importance aux programmes et aux services accessibles et adaptés à la culture. En tant qu'ancienne fonctionnaire du gouvernement du Nunavut, j'apprécie grandement de pouvoir faire ce que je peux pour aider et m'assurer que ces programmes sont disponibles pour la population du Nunavut. Je suis consciente de la réalité actuelle dans laquelle vivent les Inuits et les Nunavummiut, car les pertes et les traumatismes liés au suicide, ainsi que la dégradation de la santé mentale due à ces pertes et traumatismes, ont eu un impact sur moi à un niveau personnel.

Victoria Madsen : Il est clair que vous vous investissez dans l'aide aux autres Nunavummiut. Qu'est-ce qui est important pour vous dans le développement de ces programmes ?

Jukipa Kotierk : Lorsqu'il s'agit d'épreuves et de traumatismes individuels particuliers, je veux pouvoir savoir que mon territoire dispose des services qui peuvent répondre aux besoins culturels des Inuits. Il est important pour moi que cela se passe de cette façon, afin que les approches holistiques continues du bien-être que notre territoire crée et soutient reflètent l'histoire et la réalité actuelle, et qu'elles contribuent à construire et à maintenir des caractéristiques saines et culturellement riches chez les Inuits.

Victoria Madsen : Et comment y parvenir ?

Jukipa Kotierk : L'une des façons d'y parvenir est de faciliter la prestation et l'élaboration de programmes de traitement terrestres, avec l'aide de conseillers cliniques ayant de l'expérience au Nunavut, ainsi que des trois centres régionaux de bien-être ou d'amitié, soit le Centre d'amitié Pulaarvik Kablu, situé à Kangiqliniq, dans la région de Kivalliq ; l'Ilisaqsivik Society, située à Kanngiqtugaapik dans la région de Qikiqtaaluk ; et le ministère de la vie saine avec le hameau de Cambridge Bay, situé à Iqaluktuuttiaq dans la région de Kitikmeot.

Ce travail est soutenu par le poste de spécialiste du programme de mieux-être, au sein de la division de la qualité de vie. Cela permet de développer le programme terrestre afin de mieux refléter la diversité du Nunavut et de permettre à toutes les régions d'être représentées de manière égale, tout en s'assurant que les mesures cliniques sont prises en compte, et en donnant l'occasion au programme de traitement terrestre d'être véritablement un programme collectif à l'échelle du territoire. Le programme de traitement sur le terrain s'adresse aux personnes souffrant de toxicomanie et a été révisé à partir du Programme Connections, qui a été offert avec succès à Cambridge Bay, et adapté pour mieux refléter la culture du Nunavut et des Inuits.

Victoria Madsen : C'est merveilleux, Jukipa. Comment le programme s'est-il développé, et quels sont les projets pour l'avenir ?

Jukipa Kotierk : Alors, le programme de traitement terrestre pour les personnes souffrant de toxicomanie est actuellement dans sa phase de nouveauté, étant donné qu'il a récemment été redéveloppé en collaboration afin de mieux refléter la culture inuite à travers le territoire. À l'heure actuelle, nous cherchons à mettre en œuvre le nouveau programme et à organiser des séances pilotes dans tout le territoire. Nous cherchons à renforcer les capacités afin de nous assurer que le programme puisse être offert d'une manière qui rencontre les participants Inuktitut là où ils sont le plus à l'aise.

Les soins de suivi sont également très importants et constituent un domaine qui nécessite une attention supplémentaire. Des mesures sont prises pour mieux offrir des services de suivi dans tout le territoire. Ce fut un plaisir de participer à l'élaboration et à la révision de ce programme afin de mieux répondre aux besoins des Inuits et des Nunavummiut. Je me réjouis de la poursuite des services et de la prestation de ce programme. En ce qui concerne son développement futur, j'espère qu'il continuera d'être soutenu avec succès dans tout le territoire et qu'il sera en mesure de répondre aux besoins des Inuits et des Nunavummiut.

Victoria Madsen : Merci beaucoup Jukipa.

Jukipa Kotierk : Merci de m'avoir reçu. Je suis vraiment heureuse d'avoir pu mettre en lumière ce programme de traitement terrestre.

Loretta O’Connor : Merci à Sheila Shweder et à Jukipa Kotierk de nous avoir fait part de tous ces renseignements sur les programmes conçus pour répondre aux besoins en santé mentale de la population du Nunavut. La grande importance accordée à la souplesse et aux choix adaptés sur le plan culturel reflète vraiment l’approche globale préconisée par le Nunavut pour la guérison et le bien-être. Dans les communautés isolées du Nunavut, l’accès aux services en santé mentale et traitement des dépendances est plus difficile. Toutefois, grâce à des approches créatives et originales telles que des programmes de mentorat pour les jeunes, des activités amicales de couture, des randonnées communautaires et des programmes de guérison sur le territoire même, le Nunavut a déjà commencé à relever certains de ces défis considérables.

Soyez des nôtres la semaine prochaine, alors que nous découvrirons l’expérience du Nouveau-Brunswick avec leur Modèle d’encadrement clinique de la Péninsule acadienne. Le modèle aide à fournir de meilleurs services de santé mentale aux jeunes qui ont des besoins complexes. Il permet une approche stratégique qui vise à déterminer les interventions cliniques qui répondent le mieux aux besoins de la jeune personne et de sa famille.

Alors, soyez des nôtres la semaine prochaine pour un autre épisode sur les pratiques prometteuses en santé mentale et dépendances.

 

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