PRATIQUES PROMETTEUSES
Un balado sur la santé mentale et les dépendances
Épisode 2 : Saskatchewan
Épisode 2 : Programme de thérapie cognitivo-comportementale offert par Internet (SK)
24 mars 2021 – Ce programme s’appuie sur la technologie pour offrir des soins à distance. Des thérapeutes en ligne orientent le traitement clinique de personnes présentant des symptômes d’anxiété, de dépression ainsi que plusieurs autres conditions. Le programme est en mesure de soutenir les personnes qui ont besoin d’aide dans toutes les régions de la Saskatchewan, qu’elles vivent dans les villes, les régions rurales ou le Grand Nord. www.onlinetherapyuser.ca
Notes d’épisode :
Ressources
- L’unité de thérapie virtuelle – consultez le onlinetherapyuser.ca
Loretta O’Connor : Bienvenue à nouveau dans la série de balados Pratiques prometteuses. Voici le deuxième d’une série de 13 épisodes sur la santé mentale et les dépendances. Cette série de balados est un projet mis sur pied par les premiers ministres des provinces et territoires du Canada. Elle vise à faire connaître les pratiques prometteuses qui ont cours à l’heure actuelle dans chaque province et chaque territoire. Je suis Loretta O’Connor, directrice générale du Secrétariat du Conseil de la fédération, un organisme qui appuie le travail des premiers ministres des provinces et territoires.
Aujourd’hui, nous sommes en Saskatchewan, une province des Prairies située au cœur du Canada. Même si près de la moitié de la population de la province vit à Regina, la capitale provinciale, ou à Saskatoon, la plus grande ville, un fort pourcentage d’habitants vit dans de plus petites villes ou dans des communautés rurales, agricoles ou du Nord. Ce vaste paysage pose des défis de taille sur le plan géographique pour les personnes qui souhaitent avoir accès à des médecins en santé mentale. En Saskatchewan, l’alcool est la substance la plus problématique pour les citoyens, mais on observe aussi une augmentation de l’utilisation des opioïdes, et du nombre de décès qu’ils entraînent. Et malheureusement, ce phénomène n’est pas unique à la Saskatchewan. Comme la plupart des autres provinces et territoires, la Saskatchewan compte aussi un nombre croissant de personnes qui font part de symptômes de dépression et d’anxiété. Le passage au virtuel et aux services offerts par le biais des technologies a augmenté au cours de la pandémie de COVID-19 pour aider les personnes qui en avaient besoin. Le tout a aussi ouvert la voie à des possibilités d’innover dans la façon d’offrir des services de santé, tant en Saskatchewan qu’ailleurs au Canada.
Aujourd’hui, nous allons en apprendre un peu plus sur le Programme de thérapie cognitivo-comportementale offert par Internet dans la province. Mais tout d’abord, écoutons le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, et le ministre de la Santé et des Dépendances, Everett Hindley.
Ceci est une traduction du message livré par le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe. Ses propos ont été enregistrés en anglais.
Premier ministre Scott Moe : Bonjour à tous. Je suis Scott Moe, premier ministre de la Saskatchewan. Je suis heureux de participer à cette série de balados sur les pratiques prometteuses en santé mentale au Canada. Il s’agit d’une discussion très importante pour nous tous. Et je tiens à remercier nos collègues du Yukon d’avoir été le fer de lance de cette initiative aux côtés de la Saskatchewan. Je suis tout particulièrement reconnaissant d’avoir obtenu l’appui de mon ami Sandy Silver, premier ministre du Yukon.
Partout au pays, on est de plus en plus conscient de l’importance de renforcer les services de santé mentale et d’aide aux toxicomanes. En Saskatchewan, nous nous efforçons de mettre en pratique les dernières innovations en la matière et de veiller à ce que les services soient accessibles à tous et adaptés aux besoins de notre population. L’un de nos principaux défis n’est en fait pas vraiment spécifique à la Saskatchewan. Un bon nombre de nos citoyens vivent dans des régions rurales et éloignées de la province. Nous travaillons à rendre les services plus accessibles à toutes ces personnes.
En Saskatchewan, une vieille tradition d’entraide entre voisins existe depuis déjà longtemps. Chacun s’attend à ce que l’on se soutienne, que l’on s’encourage mutuellement et que l’on prenne soin des plus vulnérables d’entre nous. Cet esprit communautaire nous sert bien à mesure que nous élargissons et enrichissons la gamme de services dans notre lutte commune contre les préjugés entourant la maladie mentale et que nous encourageons les gens à demander de l’aide s’ils se sentent isolés, abandonnés ou découragés. Aujourd’hui, j’ai le plaisir de vous présenter et d’accueillir Everett Hindley, le ministre saskatchewanais de la Santé mentale et de dépendances. Le ministre Hindley représente la circonscription de Swift Current à l’Assemblée législative de la Saskatchewan. Et il est le premier membre du cabinet de l’histoire de la Saskatchewan à avoir pour principales responsabilités la santé mentale et la lutte contre les dépendances. Everett, vous êtes en poste depuis environ trois mois, et je suis persuadé que vous en avez appris beaucoup depuis sur le défi auquel nous sommes confrontés en Saskatchewan. Au cours de la présente année budgétaire, notre gouvernement a investi un montant record de 435 millions de dollars dans les services de santé mentale et de lutte contre les dépendances ainsi que dans les services de soutien connexes. J’aimerais que vous parliez un peu des investissements prioritaires que nous avons réalisés en Saskatchewan au bénéfice des gens qui vivent ici.
Ministre Everett Hindley : Bien sûr, Monsieur le premier ministre. Merci pour cette présentation et merci de m’avoir confié la responsabilité de ce poste. Vous avez raison. Je pense que ce que j’ai appris au cours de ces quatre premiers mois en tant que ministre responsable de ce portefeuille, c’est simplement, vous savez, à quel point c’est important. Je pense que les gens de la Saskatchewan, peu importe les groupes, les individus et les organisations avec lesquels j’ai eu l’occasion de parler, m’ont fait réaliser l’importance des défis en matière de santé mentale et de lutte contre les dépendances auxquels nous sommes confrontés dans cette province. Et j’ai constaté que ce n'est pas, vous savez, spécifique à notre province. Bien entendu, c’est une situation à laquelle nous sommes tous confrontés, tous les gouvernements des provinces et des territoires à travers le pays, et nous cherchons tous à faire tout ce que nous pouvons pour fournir le meilleur soutien possible.
Ici, en Saskatchewan, nous avons discuté avec le premier ministre de quelques-uns des investissements records, en termes de dollars, consacrés à la santé mentale et aux dépendances. Nous avons, vous le savez, fait des annonces importantes à ce sujet. Parmi les mesures que nous avons instaurées, il y a les équipes multidisciplinaires de rétablissement communautaire. Elles sont établies dans toute la province. Elles viennent en aide aux adultes et aux jeunes qui éprouvent des problèmes complexes et parfois simultanés de santé mentale et de toxicomanie. Elles travaillent dans plusieurs collectivités de la Saskatchewan.
Nous élargissons également les services résidentiels offrant du soutien aux personnes qui ont des problèmes de santé mentale chroniques et persistants. Des services supplémentaires sont donc offerts dans plusieurs de nos collectivités — Regina, Saskatoon, Prince Albert et North Battleford. Et ce qu’ils font, en fait, c’est qu’ils permettent de passer des soins intensifs en santé mentale aux soins communautaires. Ça permet de répondre aux besoins en matière de logement et de contribuer à d’autres aspects du rétablissement, comme les aptitudes à la vie quotidienne, l’emploi, l’éducation et l’inclusion sociale. Piliers pour la vie, vous en avez peut-être entendu parler, c’est le nom du plan de prévention du suicide de la Saskatchewan, présenté l’année dernière au mois de mai. C’est le fondement sur lequel reposent les programmes de prévention du suicide mis en place et approuvés par notre gouvernement et ses partenaires et qui s’appuieront sur le bon travail déjà en cours. Et ce plan prévoit la participation des dirigeants des Premières Nations, dont les enseignements et les perspectives seront intégrés au travail de prévention du suicide.
À ce sujet, en plus de Piliers pour la vie, nous avons également signé avec la Fédération des nations autochtones souveraines (FSIN) et le gouvernement fédéral une lettre d’engagement à lutter contre le suicide chez les Autochtones en Saskatchewan. Il s’agit d’une lettre d’engagement qui a été signée en septembre dernier par l’ancien ministre et ce qu’elle fait, c’est qu’elle renforce notre engagement à prendre des mesures pour réduire les taux de suicide parmi la population autochtone de notre province. Et, vous savez, j’ai eu plusieurs conversations avec des représentants de la FSIN sur la meilleure façon de procéder.
Enfin, un autre exemple que je pourrais donner aux auditeurs est celui des cliniques sans rendez-vous que nous avons instituées ici, en Saskatchewan. Plus de deux douzaines de ces cliniques sont accessibles dans notre province; elles offrent des séances de consultation individuelle gratuites et orientent les personnes qui ont besoin d’un soutien supplémentaire ou plus urgent. Ces cliniques ont été un ajout bienvenu. Alors, je pense que nous avons fait des investissements importants. Je pense que nous allons dans la bonne direction, mais bien sûr, il y a encore du travail à faire et nous sommes impatients de relever le défi.
Premier ministre Moe : Merci beaucoup, Everett, pour cet aperçu très complet et cette analyse vraiment détaillée de ce que nous faisons, ici, en Saskatchewan. Je vous remercie de votre détermination à vous engager auprès de la population de la province et du pays sur la question de la santé mentale et, trop souvent, des dépendances qui en découlent, et à veiller à ce que nous fassions de notre mieux en tant que société pour offrir le soutien dont les gens ont besoin aujourd’hui et qu’ils nécessiteront demain.
J’aimerais rappeler à tous ceux qui nous écoutent que, si vous ou une de vos connaissances avez des difficultés, vous pouvez obtenir de l’aide. L’aide est toujours disponible. Des ressources sont indiquées sur le site Web saskatchewan.ca. Et n’importe qui en Saskatchewan peut appeler la ligne secours 811, jour et nuit, pour obtenir une aide professionnelle gratuite et confidentielle. S’il vous plaît, si vous avez besoin d’aide, tendez la main. On peut vous aider.
Ministre Hindley : Merci, monsieur le premier ministre. J’ai maintenant le privilège d’animer une conversation sur un projet qui, pour certaines personnes en Saskatchewan, fait toute une différence et qui est connu sous le nom de « thérapie cognitivo-comportementale par Internet », ou TCCI. Il s’agit d’un programme qui utilise la technologie pour offrir des soins à distance. Des thérapeutes en ligne guident le traitement clinique de personnes présentant des symptômes d’anxiété, de dépression et de diverses autres affections. La TCCI est en mesure de soutenir les personnes qui ont besoin d’aide dans toutes les régions de la Saskatchewan, qu’elles vivent dans les villes, les régions rurales ou le Grand Nord. Notre gouvernement est fier de financer cette initiative sans précédent conçue chez nous. Ce projet est mis en œuvre par l’Université de Regina et la Saskatchewan Health Authority, avec le soutien de divers partenaires de recherche. J’espère que vous serez heureux d’en entendre parler. Pour de plus amples renseignements, veuillez consulter le site www.onlinetherapyuser.ca.
Loretta O’Connor : Voilà une présentation tout à fait à propos concernant l’initiative dont nous parlerons aujourd’hui, et le travail qu’accomplit le gouvernement de la Saskatchewan. Je cède à nouveau la parole au ministre Hindley, qui nous en dira plus sur cette pratique prometteuse de la Saskatchewan.
Ceci est une traduction d’un balado qui a été enregistré en anglais.
Ministre Hindley : Je suis Everett Hindley, ministre de la Santé mentale et de dépendances de la Saskatchewan. Je m’entretiens aujourd’hui avec Heather Hadjistavropoulos, professeure au département de psychologie de l’Université de Regina. Heather est responsable de l’unité de thérapie en ligne et du Programme de thérapie cognitivo-comportementale par Internet. Merci beaucoup, Heather, de prendre le temps de me parler du programme aujourd’hui.
Dre Heather Hadjistavropoulos : Tout le plaisir est pour moi.
Ministre Hindley : Tout d’abord, pourriez-vous expliquer très simplement aux auditeurs ce qu’est la thérapie cognitivo-comportementale par Internet, ou TCCI comme nous l’appelons, pour quelqu’un qui n’a aucune idée de ce que c’est? Pouvez-vous peut-être expliquer en quoi consiste le programme? Et quel est son objectif final?
Dre Hadjistavropoulos : Oui, bien sûr. C’est une très bonne question, car je pense qu’il y a parfois une certaine confusion entourant la TCCI. Certains sont portés à croire parfois qu’il s’agit d’un thérapeute et d’un patient qui discutent par vidéo, comme sur Zoom ou quelque chose du genre. Mais en fait, c’est vraiment très différent. Alors, ça consiste à donner aux clients l’accès à du matériel de traitement en ligne sur lequel ils travaillent pendant plusieurs mois. Et ce que nous faisons ainsi, c’est partager avec le client le même type d’informations qu’il obtiendrait dans le cadre d’un traitement face à face. Les clients apprennent à développer des stratégies clés conçues pour les aider à résoudre leurs problèmes de santé mentale, principalement la dépression, l’anxiété, l’abus d’alcool ou la gestion d’une maladie chronique. Parallèlement à ce travail avec le matériel de traitement en ligne, un thérapeute apporte son soutien, généralement par le biais d’échanges de courriels. Donc, le client envoie un courriel au thérapeute, et le thérapeute lui répond par la suite. Et pour les clients qui ne sont pas vraiment à l’aise avec la communication par courriel, nous proposons également un soutien par téléphone. Voilà en gros à quoi ressemble la TCCI. L’idée principale est que nous cherchons vraiment à faciliter l’accès des clients à la thérapie cognitivo-comportementale, un type de traitement que nous savons très efficace, mais auquel il est difficile d’accéder. Et nous essayons de faire disparaître les nombreux obstacles rencontrés par les clients lorsqu’ils tentent d’avoir recours à la thérapie. Un premier obstacle pourrait être, par exemple, leur lieu de résidence. En effet, si vous habitez dans une région rurale ou éloignée, il est très difficile d’avoir accès à ce traitement pourtant très efficace. Un autre problème est simplement d’avoir le temps de recevoir le traitement. Et une troisième difficulté est que les clients sont parfois réticents à l’idée d’aller consulter un thérapeute en personne; ce programme leur donne accès au traitement, mais dans l’intimité de leur propre maison.
Ministre Hindley : C’est vrai. Oui, c’est un très bon point. Il s’agit donc d’un outil supplémentaire auquel les gens peuvent avoir accès. En introduction, j’ai mentionné certains des services qui sont actuellement offerts en Saskatchewan, dont la consultation en personne, mais vous avez raison, je pense que tout le monde n’est pas forcément à l’aise avec l’idée de se rendre à une clinique sans rendez-vous ou d’appeler pour prendre un rendez-vous en personne. Je pense donc qu’à première vue, ce programme est une excellente solution pour les personnes qui reconnaissent avoir besoin de soutien, mais qui ne savent pas par où commencer. C’est un excellent premier pas. Je pense que c’est important. Et vous avez mentionné l’accès. Je pense que c’est aussi très pertinent parce que, vous avez raison, peut-être que les gens, lorsqu’ils entendent parler de la TCCI pour la première fois, comme vous l’avez dit, eh bien, ils peuvent penser que c’est un Zoom en ligne ou une vidéoconférence avec un thérapeute, alors que ce n’est pas nécessairement le cas parce que, comme vous l’avez dit, dans certaines parties de la province, si vous êtes dans des régions rurales ou éloignées, la couverture Internet et cellulaire peut être un peu difficile. Donc, c’est considéré comme un obstacle potentiel. C’est pourquoi je pense que c’est un aspect vraiment unique du programme.
Dre Hadjistavropoulos : Et, vous savez, c’est vraiment apprécié par les clients, nous recevons beaucoup de commentaires très positifs dans lesquels ils disent qu’ils ne seraient pas allés consulter quelqu’un en personne, ou bien qu’ils n’en avaient pas la possibilité, donc nous constatons clairement que les clients apprécient cette nouvelle manière d’obtenir des soins. C’est un peu comme une autre porte d’accès aux soins, ou un chemin différent.
Ministre Hindley : C’est vrai. Alors, peut-être pourriez-vous nous parler un peu de l’histoire du programme. Comment en êtes-vous arrivée à constater ce besoin? À partir de quel moment? Comment le projet a-t-il démarré à partir du moment où vous avez décidé de mettre en place le programme de TCCI ici, à Regina?
Dre Hadjistavropoulos : En fait, nous avons commencé il y a 10 ans. Il est difficile de croire que nous avons célébré notre 10e anniversaire l’automne dernier. L’idée est venue en consultant la documentation de recherche. La recherche démontrait par des essais cliniques que c’était vraiment efficace [la TCCI]. Mais lorsqu’on a commencé, la méthode n’était pas vraiment accessible aux clients, nulle part au Canada. Nous avons été parmi les premiers à lancer ce type de programme de traitement. Et nous avons été capables de le faire parce que nous avons pu obtenir un financement par l’intermédiaire des Instituts de recherche en santé du Canada, par l’intermédiaire d’une subvention de ce qu’on appelait le Partenariat pour l’amélioration des services de santé. Et ce que cette subvention a permis de faire, c’est de jumeler des chercheurs qui voulaient collaborer avec des fournisseurs, avec des gestionnaires, avec des décideurs et avec le gouvernement, essentiellement pour améliorer les soins de santé mentale. Et c’est donc de là que tout est parti.
Ministre Hindley : Parlons un peu des utilisateurs du programme jusqu’à présent. Je sais que vous avez des statistiques sur le nombre de personnes qui ont accédé au programme. Le programme est géré par l’Université de Regina. Et pour ceux qui écoutent ce balado et qui ne connaissent peut-être pas les données démographiques de la Saskatchewan, nous avons une province très variée en termes de population, assez éparpillée dans certaines régions de la province. Mais qu’avez-vous découvert en ce qui concerne la provenance de vos utilisateurs? Est-ce qu’il y a une forte proportion de personnes qui proviennent des villes, de Saskatoon ou de Regina parmi les participants? Ou avez-vous constaté une assez bonne participation des régions rurales de la Saskatchewan ou des communautés des Premières Nations du nord de la province? À quoi ressemble la répartition?
Dre Hadjistavropoulos : Oui, alors en fait, nous desservons l’ensemble de la province. Et l’année dernière, nous avons travaillé avec 2 600 clients qui proviennent de partout dans la province. Je pense qu’un facteur qui sème parfois la confusion, c’est que nous sommes basés à l’Université de Regina, alors les gens pensent que nous travaillons uniquement avec des clients de Regina. Mais ils proviennent en fait de partout dans la province. En réalité, 60 % de nos clients proviennent de l’extérieur de Regina et de Saskatoon, et 5 % de nos clients s’identifient comme membres des Premières Nations ou comme Métis. Il s’agit donc d’un groupe très diversifié. La fourchette d’âge des clients est également très intéressante. Elle varie de 18 à 88 ans. C’est donc fortement diversifié. Une autre chose que l’on constate également, c’est une grande diversité dans la gravité des cas : environ 15 % des clients avec lesquels nous travaillons ont, vous savez, de très légers désagréments. Nous savons aussi qu’environ 55 % prennent des médicaments pour des problèmes plus sérieux, et qu’environ 32 % déclarent avoir régulièrement des pensées suicidaires. Nous travaillons donc avec un éventail vraiment diversifié de clients.
Ministre Hindley : C’est très bien. Alors, comme vous l’avez décrit plus tôt, parlons un peu du programme, juste pour nous aider à le définir et à apprendre comment il fonctionne. Vous savez, nous avons déjà compris que ce n’est pas trop technique. Oui, c’est en ligne, mais ce n’est pas difficile, loin de là, en termes de technologie à utiliser, pour les personnes qui pourraient y être réfractaires. Vous avez mentionné les composantes du cours en ligne, et vous avez souligné que parfois, peut-être, certaines personnes peuvent se sentir découragées lorsqu’elles entendent l’expression « cours en ligne ». Je pensais, juste à titre d’exemple… — et je suis heureux que vous ayez mentionné la tranche d’âge et que vous ayez parlé de personnes âgées de 18 à 80 ans — … qu’il y a probablement des gens qui pourraient se dire : « Oh, vous savez, c’est trop compliqué pour moi. Ça fait des dizaines d’années que je ne suis pas allé à l’école et ça me paraît difficile à assimiler. » Et cela pourrait les dissuader de s’engager dans cette voie et d’essayer d’accéder au programme. Peut-être pourriez-vous parler un peu de la partie cours en ligne, de ce que cela implique et de ce à quoi une personne peut s’attendre.
Dre Hadjistavropoulos : Oui, alors tout d’abord, les clients vont sur notre site Web, donc sur la page onlinetherapyuser.ca. Ils commencent par remplir un questionnaire en ligne avec des renseignements généraux sur ce qu’ils ont vécu. Ensuite, nous les contactons par téléphone. Cet appel est très important, car il permet de nous assurer que les clients comprennent relativement bien en quoi consiste le cours, et aussi d’établir une relation avec eux. Puis, si les clients sont toujours intéressés, ils reçoivent un nom d’utilisateur et un mot de passe pour se connecter au site Web. Et ce n’est pas plus compliqué que ça. Une fois qu’ils ont accédé au site Web, ils peuvent télécharger les documents, les conserver sur leur ordinateur et les consulter à long terme, sans avoir besoin d’être sur l’ordinateur à plein temps pour les examiner. Et c’est particulièrement important pour les clients qui ont un accès à Internet de piètre qualité. Il leur suffit donc d’avoir un accès suffisant à Internet pour se connecter et obtenir les documents, et ensuite ils peuvent les consulter sur leur téléphone ou leur ordinateur à leur guise. Une autre possibilité pour eux est de se connecter, et c’est là qu’ils pourraient envoyer un courriel à leur thérapeute. Mais ça ressemble à n’importe quel système de messagerie de base. Et s’ils ne sont vraiment pas à l’aise avec ça, nous organisons dans ce cas des appels téléphoniques avec eux, alors, oui, on parle d’une technologie de base de leur côté. C’est un peu plus technique du côté du thérapeute et en ce qui concerne le type de services offerts sur le site Web. En effet, du côté du thérapeute, nous avons des choses comme la messagerie automatisée, nous avons des documents qui sont envoyés aux clients, progressivement, au fil du temps. Il y a des questionnaires qui permettent de suivre les progrès des clients au fur et à mesure. Vous savez, nous devons veiller à ce que tout soit sécurisé et sauvegardé, et nous prenons la confidentialité des clients très au sérieux. Les thérapeutes bénéficient d’un soutien important afin qu’ils sachent comment aider au mieux leurs clients. Il y a donc beaucoup de matériel en ligne qui aide vraiment les thérapeutes à aider leurs clients. Et puis, il y a aussi l’exportation des données à notre intention. Nous voulons récupérer les données et les examiner, sans qu’il soit possible d’identifier les clients, pour comprendre quelles sont les forces du programme, et où il serait possible d’apporter des améliorations. Alors, de ce côté, c’est un peu plus technique, mais du côté du client, c’est en fait assez simple. Je devrais également mentionner, et Justin en parlera dans un petit moment, que nous avons passé beaucoup de temps à examiner les documents et à les rendre très conviviaux pour les patients, pour qu’ils soient faciles à comprendre et à assimiler; nous présentons l’information en petits morceaux pour qu’elle soit vraiment facile à comprendre et à suivre.
Ministre Hindley : Les cours et le programme sont-ils encadrés par un horaire fixe ou adaptés aux besoins du client? Ou est-ce que les gens ont la possibilité, et je pense que vous en avez parlé un peu, d’y aller à leur propre rythme? Pour beaucoup de gens, il y a tellement d’autres choses qui les occupent dans leur vie quotidienne, que ce soit leur famille, leur carrière, ou peut-être leurs études, entre autres. Quelle est la flexibilité du programme et comment le client peut-il l’aborder? Est-ce qu’il offre une certaine marge de manœuvre ou la possibilité de faire des compromis en quelque sorte?
Dre Hadjistavropoulos : C’est vraiment une excellente question. Il y a beaucoup de flexibilité dans le programme. Il est vrai que nous suggérons aux clients de travailler sur une période de huit semaines. Mais à l’intérieur de ce laps de temps, lorsque vous travaillez sur la première leçon, vous pouvez vraiment prendre le temps de regarder tout cela et d’y travailler. Et à n’importe quel moment : vous pouvez le faire le soir, ou le jour; vous pouvez diviser le tout en petites parties au cours de la semaine. Il y a aussi beaucoup de flexibilité, même, en termes de contenu. Alors, il y a quelques stratégies essentielles que nous enseignons, et nous pensons qu’il est vraiment important de passer par là. Mais nous avons également à la disposition des clients beaucoup de ressources additionnelles qu’ils peuvent choisir de consulter à leur guise. Nous avons donc des ressources supplémentaires si vous avez des problèmes de sommeil, de communication ou d’affirmation de soi. Elles ne sont pas obligatoires, et il y a de nombreuses façons de les utiliser. Et nous avons aussi intégré à notre matériel beaucoup d’histoires personnelles et d’exemples auxquels les clients peuvent s’identifier. Nous nous efforçons de tenir compte de la diversité des clients et de présenter autant d’exemples que possible à partir d’histoires vécues par des clients différant tant par l’âge, le sexe et la profession que par la nature de leurs problèmes. Le programme fait donc preuve d’une grande souplesse en ce sens. En même temps, nous encourageons vraiment les clients à essayer de suivre le programme sur une base hebdomadaire, et à s’y appliquer, car il est très facile, quand on a des problèmes de santé mentale, d’être contrôlé par nos autres préoccupations. Alors, une bonne partie du travail du thérapeute consiste à aider le client à s’assurer qu’il donne à sa santé mentale le temps qu’elle mérite, parce que c’est tellement important.
Ministre Hindley : C’est parfait. Vous savez, je pense que vous avez vraiment souligné l’essentiel. La flexibilité du programme qui permet aux gens de, vous savez… vous avez le cadre recommandé de huit semaines, mais aussi la flexibilité pour les clients de pouvoir aller à leur propre rythme, à n’importe quelle heure du jour ou du soir, peu importe le moment où ils peuvent accéder au matériel. Et je pense que c’est un élément important. Je pense que ça permet de faire tomber certaines barrières pour les personnes qui n’ont peut-être pas accès à d’autres services en santé mentale. Ça me paraît un excellent programme à cet égard. Vous êtes impliquée dans le domaine depuis longtemps, Heather, et… je rappelle que nous parlons aujourd’hui avec Heather Hadjistavropoulos, une professeure au département de psychologie de l’Université de Regina. Qu’est-ce qui vous a surprise dans le programme au fil des ans? Vous avez mentionné comment il a réussi à s’adapter aux besoins des clients, et nous y reviendrons dans la deuxième partie, lorsque nous demanderons à Justin de nous expliquer comment cette approche a été intégrée à l’ensemble du processus. Mais avez-vous été surprise par quelque chose en cours de route, à mesure que vous continuiez à développer ce programme et à l’offrir aux gens de la province, est-ce que quelque chose a attiré votre attention en chemin?
Dre Hadjistavropoulos : Il y a tellement de choses, en fait. Au tout début, nous ne savions pas du tout comment le programme serait accueilli ni combien de clients y prendraient part. Et ensuite, comment il se développerait au fil du temps. Mais, clairement, nous constatons une augmentation constante du nombre de participants chaque année. L’année dernière, par exemple, nous avons eu 40 % de clients de plus que l’année précédente. Et je dirais qu’en moyenne, nous enregistrons une croissance de 30 à 40 % chaque année. Je pense que ce qui m’a vraiment surprise, c’est la satisfaction des clients vis-à-vis de ce type de programme. À la fin du traitement, les taux d’achèvement sont excellents. Environ 85 % des clients auront terminé la majorité des documents. Et, vous savez, c’est un engagement de taille à prendre pour les gens afin de tirer vraiment avantage de ce service. Et à la fin, 95 % disent qu’ils recommanderaient ce service à un ami, et que ça en valait la peine. C’est tellement encourageant. Une autre chose qui m’a surprise, je dirais, c’est que, lorsque j’ai commencé, je savais que cela pouvait être utile pour traiter la dépression et l’anxiété. Mais on voit vraiment maintenant que cela s’applique à tellement de types de problèmes différents. Nous l’avons donc appliqué aux clients qui ont un problème de consommation abusive d’alcool. Et nous l’avons également étendu pour aider les gens à gérer le stress lié à une maladie chronique.
Ministre Hindley : Nous venons de parler un peu de la croissance statistique du programme. C’est étonnant, vous savez, et franchement très encourageant de constater, premièrement, le nombre de personnes qui suivent le programme et le terminent jusqu’au bout, et, ensuite, le nombre de personnes qui affirment qu’elles le recommanderaient volontiers à leurs amis et aux membres de leur famille. C’est un formidable indicateur de succès. Lorsque vous arrivez à faire en sorte que non seulement les gens le complètent, mais qu’ils sont prêts à en parler aux autres, à aider à faire passer le mot, que ce soit par le bouche-à-oreille, par courriel, par les médias sociaux, ou de quelque autre façon que ce soit, simplement en parlant aux gens pour les sensibiliser, ça me semble un excellent indicateur du succès du programme, n’est-ce pas?
Dre Hadjistavropoulos : Oh, ça veut tout dire, si vous êtes prêt à en parler à quelqu’un d’autre. Particulièrement dans le cas des clients qui ont des problèmes de santé mentale et qui sont souvent très discrets, le fait qu’ils aient été si impressionnés par le service et en aient tiré un tel bénéfice qu’ils sont prêts à révéler leurs difficultés et à nous recommander à d’autres clients, ça signifie beaucoup, oui.
Ministre Hindley : Je suis Everett Hindley, ministre de la Santé mentale et de dépendances de la Saskatchewan. Et nous avons parlé aujourd’hui avec Heather Hadjistavropoulos. Elle est professeure au département de psychologie de l’Université de Regina, et est responsable de l’unité de thérapie en ligne et du Programme de thérapie cognitivo-comportementale par Internet, ou TCCI. Heather nous a permis aujourd’hui d’en apprendre davantage sur les réussites du programme de TCCI en Saskatchewan. Nous allons prendre une brève pause ici et nous reviendrons ensuite pour parler à quelqu’un qui a participé à l’élaboration du programme de TCCI, et en apprendre un peu plus sur son fonctionnement et peut-être sur la direction à prendre pour l’avenir. Nous serons donc de retour dans quelques instants.
Loretta O’Connor : Merci d’avoir aidé nos auditeurs à mieux comprendre le Programme de thérapie cognitivo-comportementale offert par Internet en Saskatchewan. Ce programme a démontré son efficacité à répondre aux besoins d’une clientèle variée, dans le confort de leur foyer et en toute confidentialité, et ce, même loin des grands centres urbains. Cette expérience axée sur le client est vraisemblablement l’un des secrets du succès du programme, offert depuis maintenant dix ans. Rejoignons maintenant le ministre Hindley et la docteure Hadjistavropoulos, qui nous en diront plus sur ce programme de thérapie à distance. Nous entendrons aussi le témoignage de quelqu’un qui était impliqué au programme.
Ministre Hindley : Bienvenue à nouveau. Je suis Everett Hindley, ministre de la Santé mentale et de dépendances de la Saskatchewan. Nous avons rencontré aujourd’hui Heather Hadjistavropoulos pour parler du Programme de thérapie cognitivo-comportementale par Internet de la Saskatchewan. Juste avant la pause, Heather, nous avons évoqué quelques statistiques et le taux de participation au programme. Peut-être pourrions-nous parler un peu de ce qui a préoccupé tout le monde au cours de la dernière année, à savoir, bien sûr, la COVID-19 et les répercussions de la pandémie sur la vie des gens. Et peut-être pourriez-vous parler du rôle joué par le programme de TCCI dans la lutte contre la COVID-19 et la pandémie à laquelle nous sommes tous confrontés.
Dre Hadjistavropoulos : Oui, bien sûr. Tout d’abord, lorsque les mesures de santé publique contre la COVID-19 ont été mises en place, je me suis réjouie du fait que nous étions déjà en service depuis 10 ans pour aider les clients; parce que beaucoup de gens n’avaient pas accès aux soins en santé mentale. Et c’était quelque chose qui était facilement accessible. Nous n’avons pas manqué un seul jour d’accueillir de nouveaux clients. Et nous avons assurément connu une forte croissance au cours de l’année. Nous observons une croissance chaque année, mais, vous savez, cette dernière année a certainement été la plus importante en termes de croissance. En janvier, par exemple, 250 nouveaux clients ont commencé leur traitement avec nous. Alors, la COVID-19 a certainement joué sur le volume de notre clientèle. Et ce que nous avons appris pendant cette période, c’est que les mêmes stratégies qui ont été utilisées pour traiter la dépression, l’anxiété et le stress, le stress en général, ont également été efficaces pour traiter le stress lié à la COVID-19. Donc, ce qu’on tente de faire, vraiment, c’est d’aider les clients à prendre conscience de leurs émotions, et de ce qui se passe, et du rôle que peuvent jouer leurs pensées, et de la façon dont ils vont réagir au stress, et aussi de l’importance des comportements et de la réaction au stress. En résumé, les stratégies normalement utilisées avant la COVID-19 sont les mêmes stratégies qui ont aidé à gérer le stress causé par la COVID-19.
Ministre Hindley : Un point que nous n’avons pas encore abordé, je crois, c’est l’importance des partenariats dans le cadre de ce programme, dans l’histoire du programme : où a été développé le matériel et comment il s’est retrouvé ici. Mais j’imagine qu’on peut affirmer sans se tromper, Heather, que les partenariats ont été déterminants pour la réussite de ce programme, et qu’il y a beaucoup d’éléments à considérer pour que ça fonctionne, n’est-ce pas?
Dre Hadjistavropoulos : Oui. Au début, nous avons tout de suite établi des partenariats parce que nous avons voulu nous appuyer sur des recherches qui avaient déjà été menées pour ne pas recommencer à partir de zéro. Nous avons donc travaillé en collaboration avec des partenaires en Australie. Et puis, au fil du temps, nous avons élargi ces partenariats. Nous avons aujourd’hui des partenaires en Suisse, en Suède et en Australie, et tous ces groupes travaillent dans le même domaine. Donc, on essaie vraiment de s’entraider. Alors, au départ, nous avons importé le matériel, puis nous avons cherché à l’adapter à la Saskatchewan, à l’utiliser au Canada, et à bâtir à partir de ça. Nous avons ajouté des histoires, des exemples et du nouveau contenu. Et puis, c’est très collaboratif et réciproque. Alors, au fur et à mesure que nous développons du matériel, nous le partageons avec l’Australie, et vice-versa. Il s’agit donc d’utiliser des connaissances qui existent ailleurs et de ne pas essayer de recommencer à partir de zéro. Vous savez, dans ce cas-là, deux têtes valent nettement mieux qu’une seule. Donc, travailler ensemble est vraiment efficace.
Ministre Hindley : C’est vraiment une bonne solution. Je pense que vous avez raison, vous savez, nous avons parlé des meilleures pratiques et examiné ce que d’autres administrations ou d’autres pays font et ce que nous pouvons en retirer pour l’utiliser ici, en Saskatchewan, et le modifier pour en faire une solution typiquement saskatchewanaise. Mais je pense que c’est bien d’entendre cette réaction pour que les gouvernements puissent se pencher sur la question et peut-être s’inspirer des programmes de la Saskatchewan, voir comment on fait certaines choses ici, dans cette province, et peut-être regarder comment il serait possible de les appliquer dans d’autres provinces et territoires du Canada. Je pense donc que c’est un aspect très positif. J’aimerais maintenant accueillir un autre invité qui participera à notre balado, pour qu’il nous apporte un éclairage additionnel : Justin Waldrop, qui a beaucoup contribué au succès du programme de TCCI ici, en Saskatchewan. Bienvenue à notre émission d’aujourd’hui, Justin.
Justin Waldrop : Eh bien, merci beaucoup de me recevoir. C’est un très grand honneur.
Ministre Hindley : J’ai hâte d’entendre certaines de vos réflexions, puisque vous avez participé ici à l’élaboration du programme. Alors, pour commencer, parlons un peu des raisons pour lesquelles vous avez décidé de vous impliquer dans le programme de TCCI. Quel est précisément votre rôle?
Justin Waldrop : Oui. Alors, il y a environ six ans, mon amie Nicole faisait partie de l’unité de thérapie en ligne et elle m’a envoyé un courriel pour m’inviter à me joindre à ce qu’on appelait le comité consultatif communautaire pour le programme de thérapie en ligne. C’était en raison de mon expérience en marketing et en communication à l’époque, et elle croyait également que mon expérience vécue en santé mentale et en toxicomanie pourrait être un atout. J’ai donc commencé par assister à des réunions, en considérant les choses principalement sous l’angle du marketing et de la communication. Avec le temps, nous avons appris à nous connaître davantage et nous avons tenu d’autres réunions. J’ai commencé à parler plus ouvertement de mon expérience et de mes idées, si on veut, en matière de santé mentale. Je dirais que ce sont deux responsabilités qui comptent beaucoup pour moi et qu’elles sont aussi importantes l’une que l’autre. Et je suis vraiment content de pouvoir participer de deux façons, si on peut dire, à chacune de nos rencontres. Je voulais vraiment donner un sens à mon expérience vécue, vous savez, à cette vie difficile marquée par les abus, les traumatismes et les dépendances. Et je suis atteint d’un trouble bipolaire. Ce n’est pas facile de gérer tout ça, parfois on ne comprend pas vraiment ou on ne voit pas comment tout ce qu’on a vécu peut peut-être nous aider dans la vie, parfois on est juste tellement accaparé par tout ça. Alors, quand vous êtes appelé à siéger à un comité comme celui-ci, et que les gens vous apprécient et reconnaissent votre expérience comme un atout, ça commence à devenir un but pour vous. Voilà. C’est ce que ça m’a apporté. Je voulais faire partie de quelque chose qui est nouveau, innovateur et sans précédent.
Ministre Hindley : Alors, du point de vue du client, quels seraient, selon vous, les principaux avantages du programme? Vous apportez un éclairage précieux sur le sujet, comme vous venez de le décrire, mais peut-être pourriez-vous nous en dire davantage là-dessus. Supposons qu’un client est intéressé par ce programme — il est peut-être en train de nous écouter présentement — et que sa curiosité est piquée par ce dont on parle, quels seraient pour lui les principaux avantages à tirer du programme de TCCI?
Justin Waldrop : Eh bien, comme Heather y a fait allusion précédemment, je pense que la thérapie en ligne offre vraiment aux gens une autre avenue, un autre chemin quand ils cherchent à obtenir de l’aide et un traitement pour tous leurs autres problèmes. Surtout si les personnes ne sont pas vraiment du genre à suivre une thérapie en personne ou une thérapie de groupe, ou à s’impliquer, disons, dans un programme de rétablissement en 12 étapes, si elles ont des problèmes de dépendance. Plusieurs répondent très bien à un traitement suivi de manière indépendante, en quelque sorte, qui leur permet de travailler par eux-mêmes, à leur propre manière et à leur propre rythme. Ils ont accès à un thérapeute en ligne avec lequel ils peuvent communiquer chaque semaine, et continuer par la suite. Alors, c’est juste une autre façon pour les gens d’obtenir de l’aide. Et je dirais aux clients que la meilleure chose à retirer de ces programmes, peu importe celui qu’ils choisiront, et particulièrement avec ce programme, c’est qu’ils vont améliorer la prise de conscience de leurs pensées, de leurs problèmes, de leurs comportements et des éléments déclencheurs. Ça va les mener à une appropriation de leur santé mentale. Et ça favorisera leur autonomie et leur capacité à se rétablir et à guérir. De manière simple et directe, et en bonne partie autodirigée.
Ministre Hindley : Vous savez quoi, cela m’amène à ma prochaine question. Je suis heureux que vous l’ayez souligné, j’allais vous demander quelle différence cela fait dans la vie quotidienne d’un client. Je pense que vous venez tout juste de le dire, en parlant de l’augmentation de la prise de conscience et de la manière dont cela aide à construire progressivement la confiance en soi d’un client. Vous avez utilisé le mot « prise de conscience », mais je pense que d’avancer dans le programme, jour après jour, ça aide progressivement. Est-ce exact?
Justin Waldrop : Eh bien, oui. Évidemment, au fur et à mesure qu’ils travaillent sur les modules pendant les huit semaines du programme, ça commence par une prise de conscience, puis les gens en viennent à chercher à savoir quels sont leurs problèmes, quels sont pour eux les éléments déclencheurs, et quels sont les comportements et les pensées nuisibles. Ensuite, il s’agit de savoir comment on peut les changer, et de remplacer ces pensées et ces comportements par des choses probablement plus constructives. Des ressources sont généralement fournies, comme dans la plupart des programmes. Et comme Heather l’a expliqué, les gens peuvent télécharger ces documents et les conserver pour toujours. Alors, vous savez, je pense que la façon dont ça les aide au quotidien, c’est que ça leur fait savoir qu’ils ne sont pas seuls au combat et qu’une aide gratuite est à portée de main. Ça les aide certainement à développer cette prise de conscience. Et je pense que cela donne également aux gens la possibilité de réaliser qu’ils sont capables de demander de l’aide pour eux-mêmes et de se prendre en main.
Ministre Hindley : Vous soulevez un bon point ici, et nous ne l’avions pas mentionné plus tôt. Mais quel est le coût du programme pour le client?
Justin Waldrop : C’est gratuit. C’est le meilleur coût! Effectivement, on ne peut pas faire mieux. Je veux dire, considérant l’extraordinaire avantage d’une thérapie comme celle-ci, une thérapie cognitivo-comportementale de haute qualité, suivie par Internet. Parce qu’il vous en coûtera en moyenne 140 $ à 200 $ l’heure pour consulter concrètement un thérapeute, et, bien sûr, la réalité est que tout le monde ne peut pas se le permettre ou avoir un régime d’assurance maladie qui couvre ces frais. Donc, c’est certainement un excellent programme accessible à tout le monde et qui offre une thérapie de très haute qualité.
Ministre Hindley : Alors, comme on l’a mentionné, le programme existe depuis un certain nombre d’années. Y a-t-il quelque chose qui vous a surpris dans son déploiement au cours de cette période, qui vous a, comment dire, sauté aux yeux, qui a attiré votre attention en cours de route?
Justin Waldrop : Eh bien, je suis certainement d’accord avec Heather quant à la croissance exponentielle du programme. Nous recevons des rapports mensuels et toutes les statistiques du programme, et nous nous réunissons tous les mois. Et après six années de participation, c’est tout simplement phénoménal de constater la croissance, les inscriptions, l’intérêt pour le programme et la progression du programme lui-même. Comme Heather l’a dit, lorsque nous avons commencé, c’était, vous savez, pour traiter la dépression et l’anxiété, puis nous sommes passés aux maladies chroniques, ensuite à l’abus d’alcool, et enfin aux troubles du sommeil. Il y a maintenant tellement de cours et de manières différentes d’aider les gens. J’ai rencontré beaucoup de personnes qui ont suivi les cours, qui les ont appréciés, qui ont exprimé à quel point ils leur ont été utiles et qui étaient si reconnaissants d’avoir eu cette ressource à leur portée. Et donc, c’est merveilleux de savoir que des personnes réelles sont passées par le programme et l’ont trouvé très utile. Et puis je pense que, sur un plan personnel, ce qui m’a surpris, c’est que le simple fait d’être impliqué depuis six ans m’a aidé à reconnaître la valeur de mon expérience vécue, et que ça peut être un actif et pas seulement un déficit. Je suis très reconnaissant d’avoir eu cette chance.
Ministre Hindley : Heather a parlé plus tôt du taux élevé de recommandation du programme, et les gens qui l’ont suivi, les clients qui l’ont suivi et à qui nous avons parlé l’ont fortement recommandé. Est-ce que vous savez, vous qui avez directement participé au programme, pourquoi? Pourquoi donc? Pourquoi recommanderiez-vous ce programme à des personnes en difficulté? Quels en seraient les avantages? Comme nous en avons parlé, il y a toute une série de programmes et de services qui existent, et il ne s’agit pas d’approches qui conviennent à tous, loin de là. Alors, c’est formidable d’avoir accès à des services comme le programme de TCCI. Mais que diriez-vous à quelqu’un qui pense à demander de l’aide et qui pourrait considérer ce programme? Que lui diriez-vous? Pourquoi le recommanderiez-vous aux gens?
Justin Waldrop : Eh bien, vous savez, j’y ai réfléchi. La première chose que je dirais aux gens, c’est que l’accès à notre série de cours de thérapie en ligne rencontre très peu d’obstacles, qu’ils sont gratuits, en ligne, et que l’inscription est simple et rapide. Les gens peuvent par ailleurs travailler à leur propre rythme, comme l’a expliqué Heather, et bénéficier du soutien et des suivis par des thérapeutes en ligne. Et je dirais aussi que la thérapie en ligne, enfin, je veux dire, tout type de thérapie en fait, permet aux gens de se pencher sur leur propre santé mentale et de décider comment ils vont se rétablir de manière sûre et autonome. Et je crois vraiment qu’elle contribue à une meilleure prise de conscience. Et qu’elle donne des outils pour gérer sa propre santé mentale. Comme on le sait, bien souvent, les dépendances, les diagnostics de problème de santé mentale, ou simplement l’anxiété ou le stress de la vie, sont des problèmes récurrents ou permanents, et je pense que la thérapie comportementale par Internet peut procurer une base solide aux personnes qui n’ont jamais suivi de thérapie auparavant. Ou bien elle peut aussi rafraîchir la mémoire des personnes qui ont suivi une thérapie dans le passé. Donc, dans tous les cas, qu’il s’agisse d’une première fois ou d’une remise à niveau, la thérapie donne aux gens une base solide à partir de laquelle ils peuvent aller de l’avant et continuer à guérir et à se remettre des problèmes auxquels ils sont confrontés.
Ministre Hindley : Et une autre chose qui me semble importante est la façon dont le programme s’est adapté au fil des ans. Nous avons discuté un peu en privé de la perspective et de l’implication du patient ou du client. Les clients peuvent dire : « Vous savez quoi, j’ai suivi le programme, ou je suis en train de le suivre en ce moment, et c’est génial, mais peut-être pourrions-nous essayer quelque chose d’un peu différent. » Pourriez-vous en parler un peu? Comment le point de vue du client peut-il contribuer à l’amélioration du programme?
Justin Waldrop : Je dois vraiment saluer Heather et son équipe, parce qu’ils se sont engagés dans ce qu’on appelle un modèle de « patient partenaire » pour la recherche et la conception des cours. Et, vous savez, je crois que beaucoup de gens ont un jour fait l’expérience d’être invités à participer à un groupe consultatif ou à un comité, et qu’ils n’ont pas vraiment eu voix au chapitre, n’est-ce pas? Vraiment, ils étaient là juste pour être là, non? Peut-être juste pour la forme ou pour représenter quelqu’un, mais c’est à peu près tout. C’est pourquoi je tiens à féliciter Heather et son équipe, car non seulement ils ont invité beaucoup d’entre nous, qui avons une expérience vécue, à devenir des patients partenaires, mais ils nous ont vraiment respectés. Ils ont intégré nos points de vue, nos expériences et nos commentaires dans pratiquement tous les aspects du programme, qu’il s’agisse de la recherche, du contenu, de l’imagerie, de la formulation, du format, de la structure, des formulaires de commentaires ou autres. Ils étaient tellement disposés à mettre en suspens leurs propres points de vue et peut-être même leur ego à certains moments, je pense. Vous savez, il y avait plusieurs détenteurs de doctorat et de maîtrise assis dans la pièce, mais ils nous ont si bien écoutés et considérés qu’ils nous ont fait sentir comme des partenaires égaux. Et, par conséquent, cela a abouti, pour le cours sur l’abus d’alcool, par exemple, en un contenu formulé d’une manière sûre, positive et chaleureuse, compatissante et douce. Avec des images plus édifiantes et positives. Cela a permis de proposer des concepts qu’ils n’avaient pas inclus, mais dont nous savions, en raison de notre rétablissement à la suite de dépendances, qu’ils devraient probablement être intégrés. Donc, ils étaient très ouverts à l’idée d’inclure beaucoup de choses, et cela a donné un cours beaucoup plus complet, bienveillant et pertinent. Ç’a été une expérience extraordinaire de faire partie d’un comité où l’on pouvait vraiment s’exprimer et avoir voix au chapitre.
Ministre Hindley : Et je pense que les avantages à retirer sont évidents quand on pense au taux de réussite dont nous avons parlé aujourd’hui et à quel point ce programme est apprécié. Donc, je pense que c’est un élément essentiel du programme. Comme nous arrivons bientôt à la fin du balado, j’aimerais vous demander à tous les deux de nous faire part de vos dernières réflexions. Commençons par Justin, puis nous passerons à Heather. Justin, en terminant, merci de nous avoir consacré du temps aujourd’hui. Peut-être pourriez-vous juste nous dire ce qui vous pousse à poursuivre ce programme, à continuer à vous impliquer, et ce qui vous passionne tant dans le programme de TCCI?
Justin Waldrop : Eh bien, comme j’y ai fait allusion précédemment, je pense qu’il est vraiment essentiel de faire comprendre au monde que les personnes qui vivent avec des problèmes de santé mentale et de toxicomanie, et qui ont cette expérience vécue, ne doivent pas seulement être des porte-parole, ils doivent également devenir des partenaires égaux en matière de santé mentale. Et, c’est certainement un élément qui a été démontré par le programme, le fait que nous avons beaucoup à apporter. Les cours de notre programme de thérapie en ligne ont été conçus à partir du modèle « patient partenaire ». Ils sont le reflet de la vérité et de la voix de personnes qui veulent aider, c’est-à-dire de personnes qui vivent avec des problèmes de santé mentale et de dépendance. C’est donc un programme qui favorise l’inclusivité et la compassion dans tout ce que nous faisons. Et ceci est fondamental pour le rétablissement. Et c’est l’une des raisons pour lesquelles je fais partie de ce programme, parce que cette compassion, cette inclusion et cette sincérité sont présentes chaque jour, à chaque réunion, dans chaque interaction que j’ai avec cette équipe.
Ministre Hindley : Et Heather, pour conclure avec quelques commentaires de votre part, qu’est-ce qui, de votre point de vue, ayant été impliquée dans ce programme, directement comme vous l’avez été pendant un certain nombre d’années, quelle est la rétroaction la plus importante que vous avez reçue au cours de toutes ces années?
Dre Hadjistavropoulos : C’est dix ans de commentaires à résumer, mais tout d’abord, je tiens à remercier chaleureusement Justin pour ses aimables propos. Ça fait tellement chaud au cœur et, vous savez, c’est la rétroaction de Justin et aussi de tous nos clients qui nous permet vraiment de continuer. Ce que nous entendons de la part des clients, c’est que cela a des répercussions positives sur ce qu’ils ressentent. Et la santé mentale a un effet d’entraînement. En parler fait non seulement en sorte qu’ils se sentent mieux, mais ça génère véritablement des répercussions positives sur leur famille, leurs amis, leurs collègues et la communauté dans son ensemble. Et l’enseignement le plus important que nous en avons tiré, je crois, c’est qu’en aidant quelqu’un, on aide tellement d’autres personnes.
Ministre Hindley : Peut-être qu’avant de terminer, vous pourriez rappeler à nos auditeurs comment ils peuvent obtenir plus de renseignements sur le programme de TCCI.
Dre Hadjistavropoulos : Oui, alors il suffit de visiter notre site Web au www.onlinetherapyuser.ca. Ça s’écrit comme un seul mot. Donc, onlinetherapyuser.ca. Nous sommes très heureux de vous y accueillir. En visitant le site Web, vous trouverez une foule de renseignements permettant d’en apprendre davantage sur le programme. Il y a une courte vidéo à regarder, de même qu’une foire aux questions. N’hésitez pas à nous contacter. Nous sommes là pour vous aider.
Ministre Hindley : Merci beaucoup à tous les deux de nous avoir donné l’occasion de discuter avec vous aujourd’hui. Nous avons eu le plaisir cet après-midi d’accueillir Heather Hadjistavropoulos, professeure au département de psychologie de l’Université de Regina, qui est responsable de l’unité de thérapie en ligne et du Programme de thérapie cognitivo-comportementale par Internet de la Saskatchewan, ou TCCI. Et aussi, Justin Waldrop, qui a joué un rôle important dans le succès de ce programme. Alors, je vous remercie, Heather et Justin de nous avoir accordé de votre temps aujourd'hui. Et merci pour tout ce que vous faites.
Merci de nous avoir donné l’occasion d’en parler. Et à tous ceux qui se sont joints à nous, merci d’avoir écouté ce balado pour en apprendre un peu plus sur ce que nous faisons ici, en Saskatchewan. Comme l’a mentionné Heather, pour plus de renseignements sur le Programme de thérapie cognitivo-comportementale par Internet de la Saskatchewan, il suffit de vous connecter au www.onlinetherapyuser.ca.
Loretta O’Connor : Nous venons d’entendre le ministre Everett Hindley et la docteure Heather Hadjistavropoulos, accompagnés de M. Justin Waldrop. Merci à tous d’avoir partagé certaines des réussites du programme de thérapie à distance pour les soins de santé mentale en Saskatchewan.
Dans le prochain épisode de notre série, nous nous rendrons dans la province voisine, le Manitoba, afin de découvrir les cliniques d’accès rapide aux traitements des dépendances. Ces cliniques sont facilement accessibles, et les gens peuvent s’y rendre pour obtenir de l’aide s’ils ont des problèmes de dépendances. Aucun rendez-vous n’est nécessaire, ni consultation préalable avec un médecin. Les cliniques d’accès rapide aux traitements des dépendances ont réussi à offrir aux patients la possibilité d’obtenir une évaluation et une consultation, de se faire prescrire des médicaments appropriés, et d’être orientés vers des programmes de traitement communautaires. Les cliniques forment une large part de l’engagement continu du gouvernement du Manitoba pour l’amélioration des services d’aide en cas de dépendances destinés à ses citoyens. Rejoignez-nous bientôt pour en apprendre davantage sur une autre pratique prometteuse dans le domaine de la santé mentale et des dépendances.